Entre 20 et 80 ans, les muscles squelettiques perdent 50 % de leur poids et la force musculaire diminue de 10 à 15 % par décennie. Cette perte de masse musculaire au cours du vieillissement définit la sarcopénie qui concerne autant le sujet malade que celui en bonne santé apparente.
L'inactivité physique au banc des accusés
La perte de volume musculaire s'associe à une modification de la composition du tissu musculaire, avec une infiltration par de la graisse et du tissu conjonctif et un appauvrissement en fibres II, impliquées dans les réponses musculaires rapides et les mouvements fins. Les muscles posturaux sont les plus touchés par la sarcopénie.
De nombreux mécanismes interviennent dans l'installation de ce phénomène. S'ils ne sont pas tous identifiés, la sédentarité, l'absence d’activité physique et l'insuffisance d'apports protéiques figurent au premier rang des facteurs en cause.
Citons également la réduction du nombre de motoneurones alpha, la diminution de la mobilisation du calcium intracellulaire, les perturbations de la sécrétion des principaux facteurs hormonaux anabolisants musculaires : androgènes, estrogènes, GH (Growth Hormone), IGF-1 (Insulinelike Growth Factor-1), la réduction avec l'âge des capacités de synthèse des protéines et particulièrement des protéines myofibrillaires (actine et myosine), le vieillissement mitochondrial et la réduction de la vascularisation avec l'âge.
Les conséquences sont prévisibles autant que délétères, exposant in fine le patient âgé au risque de perte d'autonomie. La première d'entre elles, la réduction de la force musculaire, est à l'origine de toutes les autres : difficultés à la marche, gêne lors de la réalisation des actes de la vie courante, incluant les courses et la préparation des repas, les montées et descentes d'escaliers et les transferts de façon générale. Le défaut de sollicitation sur les structures osseuses favorise l'ostéopénie, celle-ci se combinant au déclin de la force musculaire pour augmenter le risque de chute et de fractures : 20 à 35 % des chutes du sujet âgé sont attribués à la sarcopénie.
Près d’un sujet sur deux de plus de 60 ans est concerné
En outre, la sarcopénie altère la thermogenèse, perturbe l'insulinosécrétion et la sensibilité à l'insuline et, du fait de l'altération du système immunitaire, rend le patient plus vulnérable à un éventuel stress médical ou infectieux.
La sarcopénie peut être évaluée grâce à la mesure de l'indice de masse musculaire squelettique (IMMS). Celui-ci se définit par le rapport de la masse musculaire évaluée par absorptiométrie bi-photonique sur la taille2. La sarcopénie modérée correspond à un déficit supérieur à un écart-type par rapport à une population de référence de 18 à 40 ans, la sarcopénie sévère à un déficit supérieur à deux écarts-type. On estime ainsi à 27-59 % la prévalence de la sarcopénie modérée chez les femmes de plus de 60 ans et à 10 % celle des sarcopénies sévères, les chiffres étant respectivement de 45 % et 7 % pour les hommes.
Mais, dans la pratique, on cherche plutôt à évaluer la dénutrition, qui correspond à un déficit en énergie, en protéines ou en tout autre nutriment, et résulte d'un déséquilibre entre les apports et les besoins de l’organisme. Ce sont principalement la carence d'apports protéino-énergétiques, fréquente en population âgée, et les situations d'hypercatabolisme qui, associées à la sarcopénie, sont à l'origine de la dénutrition.
Le sujet âgé présente quelques particularités. En effet, lors d’une carence d’apports, si le sujet jeune perd de la graisse, le sujet âgé puise dans sa masse maigre mais mobilise peu les réserves de sa masse grasse : il perd du muscle. Les situations d'hypercatabolisme, correspondant aux infections, cancers, états inflammatoires aigus ou chroniques, etc., contribuent à la perte de masse musculaire (sollicitation de la réserve protéique afin d'assurer les processus de réparation : cicatrisation, synthèse des protéines de l’inflammation, mise en jeu du système immunitaire). De plus, la personne âgée ne reconstitue pas ses réserves nutritionnelles ad integrum après l'épisode aigu et l'on constate, au fur et à mesure des épisodes, une dégradation progressive de la réserve protéique musculaire.
La supplémentation protéique seule ne suffit pas
Les deux piliers de la prise en charge de la sarcopénie sont l'amélioration du statut nutritionnel, notamment protéique, et la pratique d'une activité physique régulière. On sait que l'exercice physique régulier d'intensité modéré contribue à augmenter la masse et la force musculaires, à réduire la masse grasse, à améliorer la vascularisation locale, la synthèse protéique locale et la synthèse des facteurs hormonaux anabolisants. Mais aussi que chez le sujet âgé fragile, la supplémentation protéique isolée n'améliore pas la masse musculaire si une activité physique ne lui est pas associée.
La supplémentation en testostérone, en estrogènes ou le traitement par hormone de croissance ne sont pas recommandés.
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