ON OBSERVE en Guadeloupe une forte mortalité d’origine cérébrovasculaire et des indicateurs de pauvreté à un niveau élevé. L’objectif de l’étude réalisée par Philippe Carrère (1) était d’estimer la relation entre hypertension artérielle (HTA) et perception de la précarité dans une population guadeloupéenne sans emploi. L’étude épidémiologique observationnelle transversale (PHAPPG) a inclus consécutivement lors de leur passage en centre de santé 2 420 sujets (55,1 % de femmes) sans emploi, âgés de 18 à 69 ans (âge médian 40 ans). La variable précarité perçue était définie par la réponse « ça va s’aggraver » à la question « comment pensez-vous que votre situation matérielle va évoluer dans le futur ? ». L’HTA était diagnostiquée sur la base de deux visites, soit au total six mesures de la pression artérielle.
HTA, obésité, dépression.
Les résultats montrent une prévalence de l’HTA égale à 17,7 % parmi les sujets pensant que leur situation matérielle allait s’améliorer dans le futur, versus une prévalence de 43,3 % parmi ceux pensant qu’elle allait se dégrader.
Après ajustement sur l’ensemble des facteurs explorés au cours de l’enquête et associés à l’HTA, une analyse multivariée par régression logistique a montré que le risque d’HTA était plus que doublé (OR = 2,4 ; p = 0,003) chez les sujets pensant que leur situation matérielle allait se dégrader dans l’avenir, comparativement à ceux pensant qu’elle allait s’améliorer. Ainsi, dans cette population, la perception de la précarité est un facteur fortement associé à l’HTA.
Une autre étude (Ozge Gemici, Besançon) a également montré une plus forte prévalence de l’obésité chez les femmes migrantes (43 % sont obèses versus 24 % chez les femmes nées en France).
De même, la prévalence de la dépression est plus importante au sein des patients précaires et doit faire partie intégrante de leur prise en charge, comme l’a montré une enquête observationnelle conduite entre septembre et décembre 2010 auprès de 250 patients consultant à la polyclinique Baudelaire de l’hôpital Saint-Antoine à Paris (2). 52 % étaient des hommes et plus de la moitié des patients (52,4 %) étaient des immigrés. Près de 40 % déclaraient ne pas avoir de couverture maladie complémentaire. La prévalence de la dépression dans cette population était estimée à 57,6 %. Elle touchait plus souvent les femmes, les immigrés et les personnes appartenant aux catégories socio-économiques les plus basses.
Des patients mal connus.
La connaissance juste des caractéristiques socio-économiques des patients par leur généraliste est globalement bonne. Cependant, ce sont les populations défavorisées, présentant un risque social important qui sont les moins souvent correctement connues (3). Ces données sont issues d’une enquête transversale, menée auprès de 52 maîtres de stage franciliens volontaires de Paris-Descartes et Pierre-et-Marie-Curie qui ont inclus aléatoirement chacun 70 patients (35 hommes et 35 femmes), entre 40 et 74 ans. Huit caractéristiques sociales des patients (CMU, ALD, vie en couple, profession, situation vis-à-vis de l’emploi, entourage du patient, situation économique) ont été recueillies en miroir auprès des patients et des médecins. Pour chaque caractéristique sociale, une variable appelée connaissance juste a été définie en cas de concordance entre les déclarations des patients et des médecins. Des modèles logistiques multivariés ont permis d’en identifier plusieurs variables explicatives.
Parmi les 3 644 patients analysés ; les taux de connaissance juste allaient de 55 à 97 % selon les caractéristiques, avec une grande variabilité au sein des patients.
Après un ajustement sur l’ancienneté du suivi et la fréquence des consultations, les connaissances justes étaient significativement liées à la position sociale des patients et décrivaient des gradients sociaux : plus le niveau d’études, la profession et la situation économique perçue sont élevés, meilleure est la connaissance des généralistes.
(1) Abstract n° 157.
(2) Abstract n° 83.
(3) Abstract n° 343.
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