Décès in utero ou dans la période néonatale, morbidité néonatale, mais encore risque plus élevé de développer, à long terme, un syndrome métabolique, une hypertension artérielle ou un diabète, les enfants PAG (en dessous du 10e percentile), qui souffrent d’un retard de croissance intra-utérin (RCIU), “méritent“ qu’on les dépiste. La difficulté étant de savoir si ces enfants PAG le sont constitutionnellement (des parents petits qui justifient une courbe de croissance attendue, au 10e percentile par exemple) ou s’ils sont en restriction de croissance en raison d’un événement intercurrent, le véritable RCIU (un phénomène dynamique, quand les enfants décrochent du 90è percentile au 10e par exemple). Au 3e percentile, un enfant est de toute façon a priori considéré comme en retard de croissance.
« Quoi qu’il en soit, il est indispensable de disposer d’une échographie précoce pour dater la grossesse et mettre l’enfant sur nos courbes », souligne le Pr Sentilhes. Celle-ci doit être réalisée entre 11 semaines et 13 semaines et 6 jours, quand la longueur crânio-caudale (qui sert au dépistage de la trisomie 21) est comprise entre 45 et 84 mm. Pour repérer des anomalies de la croissance, cette échographie du 1er trimestre est la plus fiable pour dater précisément la grossesse, bien mieux que la date des dernières règles.
Les patientes à risque de RCIU doivent être identifiées pour améliorer la pertinence du dépistage. Ainsi, les femmes qui ont des antécédents de bébés PAG, au bilan étiologique néonatal négatif. On considère alors que le RCIU est probablement d’origine vasculaire et la patiente reçoit une dose quotidienne d’aspirine nourrisson (100 mg) lors des grossesses ultérieures qui réduit le risque de récurrence d’un problème de croissance de10 %.
Deuxième raison majeure de RCIU, le tabagisme de la maman, sans que l’on puisse déterminer de dose cut-off : au-delà de 5 cigarettes par jour, le risque de RCIU est significatif, très significatif au-delà de 10 par jour. Continuum du risque oblige, le zéro cigarette comme le zéro alcool est le principe qui prévaut… Un syndrome métabolique, surcharge pondérale, diabète, etc., est un autre facteur de risque déterminant. A l’origine d’un RCIU encore, les affections auto-immunes (un lupus notamment) ou une HTA. « L’âge maternel, la consommation de toxiques et la précarité sont des indicateurs très forts de risque », résume-t-il.
En dehors des échographies (la 2e à 22-24 semaines, la 3e à 32-34 s), « la hauteur utérine, pourtant tombée en désuétude, regrette-t-il, est un bon outil de dépistage qui permet de “récupérer“ les RCIU entre 22 et 32 semaines, puis après 32 semaines ». Une hauteur discordante avec l’échographie doit inciter à renouveler l’échographie, d’autant plus volontiers que la femme est à risque. Il n’existe pas de marqueur biologique pour dépister un RCIU.
Une fois le RCIU effectivement confirmé par l’échographie, c’est à l’obstétricien que revient de pratiquer un bilan exploratoire, adapté. « Cela dit, notre problème en France comme ailleurs, observe le Pr Sentilhes, c’est que le dépistage du RCIU est largement perfectible : 22 % seulement en France sont repérés, 30 % des plus sévères… ».
Certes l’échographie est un outil intéressant, mais ce n’est pas une balance ; la marge d’erreur pour le poids estimé varie de 10 à 15 %. Pour affiner l’estimation et mieux identifier les PAG, « il faudrait, estime-t-il, tenir compte des paramètres qui influencent le poids, comme le sexe de l’enfant à naître, l’âge de la mère, son poids et la parité et/ou la taille des parents ». De telles courbes existent désormais et le CNGOF incite fortement les centres de référence à les utiliser.
À la naissance, un avis pédiatrique est systématiquement requis et les courbes spécifiques qui figurent dans les dernières pages du carnet de santé sont ensuite le meilleur baromètre de la croissance.
* Gynécologue et obstétricien au CHU d’Angers et coordinateur des recommandations pour la pratique clinique sur le RCIU pour le CNGOF
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