Toutes les structures neuro-anatomiques permettant de percevoir un influx douloureux sont en place dès 26 semaines de vie intra-utérine, alors que les systèmes inhibiteurs ne sont matures que vers trois mois de vie. Ainsi, le nouveau-né et le petit nourrisson non seulement perçoivent la douleur mais ils ont un seuil douloureux plus bas que les enfants plus grands.
La douleur doit donc être prise en compte d’autant plus qu’elle génère un phénomène de mémoire implicite, initialement décrit par Anna Taddio en 1997 et aujourd’hui largement documenté. Sur le plan neurophysiologique, « il existe une sensibilisation centrale, voire périphérique, qui se traduit par une modification du seuil douloureux, une moindre tolérance et une détresse émotionnelle beaucoup plus importante, pouvant aller jusqu’à la phobie des soins lorsque les gestes sont répétés », souligne le Dr Catherine Devoldère.
À côté des pleurs et des cris, la douleur chez le nouveau-né se manifeste au niveau facial par une crispation, une ouverture de la bouche voire des trémulations du menton lors de soins importants, que l’on observe heureusement aujourd’hui moins souvent grâce aux mesures préventives. Les membres peuvent également être crispés, avec une extension des jambes et des doigts. La douleur est aussi objectivée par des modifications végétatives traduisant un stress physique : augmentation de la fréquence cardiaque et respiratoire, parfois désaturation et biologiquement augmentation des hormones du stress.
C’est sur la base de ces manifestations que des échelles d’évaluation de la douleur ont été établies : DAN (douleur aiguë chez le nouveau-né) et PIPP (Prématuré infant pain profile, très utilisée dans les études) pour la douleur aiguë et EDIN (Échelle de douleur et d’inconfort du nouveau-né) pour la douleur plus chronique.
Les nombreuses solutions à différents âges
En pratique, pour limiter la douleur lors des soins, en particulier lors des vaccins, les moyens non médicamenteux seront privilégiés.
Les stimulations sensorielles (bruit, lumière) doivent être réduites au maximum, la voix du parent jouant son rôle calmant. L’enfant doit être installé dans une position confortable en flexion, dans les bras du parent plutôt que sur la table d’examen, si possible en l’enveloppant, ce qui diminue le stress. Le peau-à-peau en position fœtale est largement préconisé en néonatalogie, mais moins facile à réaliser en consultation de médecine générale.
Chez l’enfant allaité au sein, une tétée débutée au moins deux minutes avant le geste douloureux a un effet antalgique prouvé et est dénuée de risque de conditionnement. L’administration d’une solution sucrée (saccharose à 24 % ou glucose à 30 %), associée à une succion pendant 2 minutes a également un effet antalgique durant de 5 à 7 minutes. Des tétines spécialement dédiées sont disponibles.
Enfin, il est possible de faire appel à la crème Emla, qui a un effet anesthésiant sur une profondeur de 3 à 5 mm ce qui permet d’atténuer la douleur.
« Il est important de bien informer les parents afin de les rendre acteurs de ces mesures, insiste le Dr Devoldère. Il est possible de leur remettre une fiche explicative pour les aider à prendre une bonne position lors des soins, telle que celle téléchargeable sur le site internet de l’association Sparadrap (1), ou de les orienter vers le guide "Soins et examens douloureux : comment aider votre bébé", disponible sur ce même site(2) ».
D’après un entretien avec le Dr Catherine Devoldère, CHU, Amiens, Présidente de l’Association Sparadrap.
(1) Fiche téléchargeable gratuitement après inscription, http://www.sparadrap.org/Catalogue/Tout-le-catalogue/Comment-s-installe… )
(2) http://www.sparadrap.org/Catalogue/Tout-le-catalogue/Soins-et-examens-d…
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