L’atrésie de l’œsophage est une malformation embryonnaire rare, dont l’étiologie reste mal précisée. Son épidémiologie en France est par contre bien connue depuis la mise en place, à l’initiative du Centre de référence des affections congénitales et malformatives de l’œsophage (CRACMO*), d’un registre exhaustif auquel sont référés depuis 2008 tous les cas d’enfants naissant vivants avec cette malformation.
Chaque année, 150 à 160 nouveaux cas sont ainsi rapportés. Un enfant sur deux présente des malformations associées, le plus souvent au niveau cardiaque, vertébral, rénal ou digestif. Dans de 25 à 30% des cas, il s’agit d’un syndrome malformatif, VATER ou VACTERL selon les sites atteints.
Le pronostic de l’atrésie de l’œsophage s’est considérablement amélioré depuis les années 1990 et il est aujourd’hui très bon, avec un taux de décès de mois de 5 %, qui concernent surtout les formes avec malformations sévères associées, les longs défects ou les prématurés. « Grâce à cette évolution majeure du pronostic, le nombre de personnes vivantes avec une atrésie de l’œsophage dans notre pays devrait passer de 6 000 aujourd’hui à environ 10 000 en 2 020 », rapporte le Pr Frédéric Gottrand, coordinateur du CRACMO.
Forme classique et long défect
Deux formes d’atrésie doivent être distinguées. La forme classique, qui représente 90 % des cas, et peut bénéficier d’une anastomose lors du premier ou du deuxième jour de vie ; une fistule œsotrachéale est présente dans 85 à 90 % des cas et doit être fermée dans le même temps. Et la forme avec un long défect (10 % des cas), de prise en charge beaucoup plus complexe, responsables d’hospitalisations prolongées, souvent émaillées de complications.
Le diagnostic d’atrésie de l’œsophage peut être suspecté en anténatal, en particulier dans les formes à long défect, face à un hydramnios et une microgastrie visualisés en échographie et/ou IRM, ce qui permet alors de programmer la naissance dans un centre spécialisé. Dans les formes simples, le diagnostic est moins souvent suspecté lors de l’échographie (20 %), et donc le plus souvent fait à la naissance, lors du dépistage systématique en salle de naissance.
« Même si le pronostic des formes simples est très bon, la première année de vie est souvent agitée », souligne le Pr Gottrand. Le nombre moyen de réhospitalisations est de 2,5 et plus de 60 % des nourrissons doivent être réhospitalisés au moins une fois, dans la moitié des cas pour une cause respiratoire et dans l’autre moitié pour des raisons digestives. La trachéomalacie et les anomalies bronchiques sont en effet constantes, tout comme les troubles de la motricité œsophagienne.
Les troubles qui persistent
Les enfants présentent le plus souvent des troubles de l’oralité, une dysphagie, parfois une sténose de l’anastomose, un reflux gastro-œsophagien (RGO) persistant et des séquelles staturo-pondérales. Des enquêtes menées chez les adolescents ont mis en évidence une dysphagie dans 30 % des cas, un RGO dans de 30 à 40 % des cas et une hyperactivité bronchique dans de 10 à 20 % des cas, sans compter le poids des malformations associées. Seuls 5 % n’ont aucun symptôme. Si la qualité de vie des patients est moindre que celle d’une population témoin, elle est toutefois relativement bonne grâce à des stratégies de « coping ». L’atrésie de l’œsophage requiert donc une prise en charge multidisciplinaire précoce, qui doit se poursuivre jusqu’à l’âge adulte. Il existe en effet un risque potentiel à long terme de cancer épidermoïde sur l’anastomose et d’adénocarcinome sur endobrachyœsophge. La transition avec la médecine adulte est organisée par un protocole national de diagnostic et de soins (PNDS).
D’après un entretien avec le Pr Frédéric Gottrand, coordinateur du Centre de référence des affections congénitales et malformatives de l’œsophage (CRACMO), hôpital Jeanne-de-Flandre, Lille.
*cracmo.chru-lille.fr
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