LA FIBROMYALGIE (FM) est une pathologie majoritairement de la femme d’âge moyen. Elle est caractérisée par des douleurs diffuses, musculaires, sans atteinte fonctionnelle, et associées à une asthénie, une anxiété et/ou une dépression, des troubles du sommeil, parfois de colopathie (syndrome du colon irritable), et des troubles cognitifs. Les douleurs se situent sur des localisations précises et à un nombre de zones supérieures à 11 sur les 18, testables selon le protocole de l’American College of Rhumatology.
Le nombre de patient(e)s atteint(e)s de fibromyalgie ou syndrome apparenté est de 1,5 à 3 % de la population… Cette pathologie sans risque de complication ou d’impact sur la durée de vie est toutefois source de coût de santé, tant par la consommation médicale de ces patient(e)s que par les coûts indirects, en arrêt de travail notamment.
Pourtant, la compréhension de la fibromyalgie reste difficile et le praticien est souvent démuni face à ces femmes douloureuses.
Mécanisme complexe.
La principale cause de la douleur dans la fibromyalgie serait due à un acheminement anormal de l’information douloureuse dans le système nerveux central, avec notamment des changements dans les voies de contrôle descendantes (lire pXXX) : une suppression des systèmes inhibiteurs et une augmentation de la voie descendante facilitatrice.
En plus du rôle important de la voie descendante dans les douleurs de la fibromyalgie, il existe une augmentation de l’excitabilité du compartiment sensoriel (sensibilisation centrale). Ces mécanismes sont le reflet sur le plan clinique d’une augmentation généralisée de la perception de la douleur. Il existe ainsi une hyperalgésie diffuse.
Par ailleurs, il semble exister un rôle important des nocicepteurs périphériques (récepteur de la douleur principalement localisés pour la fibromyalgie dans les muscles et les structures articulaires ou périarticulaires). En effet certaines zones gâchettes (trigger zone), souvent des cordons douloureux musculaires, sont responsables de symptômes plus diffus et favorisant l’amplification du signal douloureux et à terme la sensibilisation centrale.
Particulièrement sensibles.
La prise en charge repose sur le traitement « central » de la douleur (lire pXXX voies descendantes) avec comme molécule de choix des antiépileptiques et des antidépresseurs, qui montrent malheureusement une efficacité médiocre en général. On vise aussi le traitement « périphérique » des zones gâchettes -notamment des structures musculaires- avec de possible(s) injection(s) d’anesthésiques locaux au niveau des cordons musculaires douloureux et surtout de la kinésithérapie adaptée, qui semble donner le plus de résultats.
Quelques règles ont été rappelées au cours du congrès avec la nécessité d’une prise en charge multidisciplinaire, une importance cruciale pour l’éducation thérapeutique (qui pourrait se dérouler dans une zone semi-formalisée : infirmiers, groupes d’éducation thérapeutique, etc.), ainsi qu’une mise en garde sur le mésusage notamment des opiacés qui se révèlent inefficaces voire contre productif avec le risque d’hyperalgésie induite par les opioïdes (cf. hyperalgésie induite). En effet ces patients(e)s, particulièrement sensibles, ont le plus fréquemment des effets secondaires importants aux traitements.
Manque d’information.
Ainsi les thérapeutiques les plus dépourvues d’effets indésirables sont fortement recommandées comme la kinésithérapie et les thérapies cognitivo-comportementales (TCC). Ces TCC sont souvent présentes sous forme de programmes de complexité et de sophistication variable, dont l’accès est restreint par le manque d’information des praticiens et/ou du coût de ces thérapies.
Devant les difficultés de prise en charge, il est normal d’avoir retrouvé en plus de cette synthèse de nombreuses présentations : 9 posters traitant du sujet dont deux semblent particulièrement intéressants. Le premier (1), traitant de la personnalité et de la psychopathologie des patients atteints de FM, a recherché des traits de personnalité ou une psychopathologie particulière chez 82 patients avec une fibromyalgie. Il est retrouvé majoritairement des femmes (seulement 3 hommes) avec des traits de caractères prédominant (anxieux et histrionique) ainsi qu’un passé médical teinté de souffrance psychique notamment dysthymie, douleurs somatoformes, troubles de l’adaptation, anxiété.
Le deuxième (2) a essayé d’objectiver une possible atteinte nerveuse des petites fibres pouvant expliquer cette sensibilisation centrale. Il a été comparé des patientes atteintes de FM et un groupe contrôle, sur leur sensibilité de détection au chaud, au froid sur différentes zones du corps et la transpiration. Une seule zone avait une différence significative entre les groupes : la main pour la détection au chaud. Il est donc à ce jour difficile de conclure que la fibromyalgie est une pathologie des petites fibres nerveuses au vu de cette étude, ce d’autant qu’elle a été menée sur 16 patientes… Ces travaux de recherches montrent la complexité et la part indispensable à la bonne compréhension des mécanismes pour permettre l’utilisation d’une thérapeutique optimale et le développement d’axes de recherche médicamenteuse.
D’après les communications de :
(1) F.J. Huertas Serna et coll. Fibromyalgia, personality and psychopathology.
(2) Jee- Ae Kim et coll. Small fiber function in patients with fibromyalgia
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