L’hyperactivité vésicale est une cause fréquente d’incontinence urinaire chez le sujet âgé. Avec l’âge, la vessie devient plus réactive, moins contrôlable, ce qui se traduit chez l’homme comme chez la femme par une pollakiurie, des impériosités avec un délai de sécurité diminué et, éventuellement, des fuites urinaires. L’hyperactivité vésicale est beaucoup plus fréquente avec l’avancée en âge (touchant 40-45 % de la population aux alentours des 75 ans versus 10 % avant 55 ans) et sa prévalence est supérieure chez la femme avant
70 ans, alors que c’est l’inverse chez l’homme.
L’hyperactivité vésicale, un processus quasi physiologique ?
« Cette hyperactivité vésicale est assez spécifique de la personne âgée du fait du vieillissement de la vessie, confirme le Pr Pierre Costa, chef du service d’Urologie-Andrologie (hôpital Universitaire Carémeau, Nîmes), avec, notamment, un échappement au contrôle cortical avec le temps, un épaississement du détrusor, une augmentation du nombre de récepteurs parasympathiques (le tout favorisant la contraction vésicale). S’ajoutent à cela le vieillissement cérébral ainsi que les pathologies affectant le système nerveux central comme les accidents vasculaires cérébraux. »
Pour autant l’incontinence urinaire ne doit pas être considérée comme une fatalité chez le sujet âgé et le praticien doit s’attacher à repérer – et traiter le cas échéant – d’éventuelles pathologies aggravantes comme une obstruction liée à la prostate chez l’homme, un prolapsus ou un rétrécissement de l’urètre chez la femme, voire une infection urinaire passée inaperçue ou une maladie neurologique que l’on pourra améliorer. « Il est aussi possible de traiter l’incontinence par hyperactivité vésicale de manière non spécifique par une rééducation périnéale et des anticholinergiques », ajoute le Pr Costa. Il existe des alternatives thérapeutiques : l’électrostimulation, soit tibiale postérieure, soit sacrée au niveau de la racine S3. Ou les injections de toxine botulique A dans le détrusor. Et l’âge n’est absolument pas une contre-indication. »
L’insuffisance sphinctérienne grande pourvoyeuse d’incontinence d’effort.
Autre cause fréquence d’incontinence urinaire chez le sujet âgé : l’insuffisance sphinctérienne. Avec les accouchements, les opérations pour adénomes ou carcinomes prostatiques, les efforts tout au long de la vie, les dénervations liées à l’âge, etc., le sphincter s’affaiblit parfois considérablement. Ce type d’incontinence à l’effort survient très facilement à la marche et pas uniquement lors d’efforts brusques. « Devant une incontinence d’effort après l’âge de 75 ans, il y a huit chances sur dix de retrouver une insuffisance sphinctérienne, estime le Pr Costa, soit associée à une hypermobilité urétrale comme chez la femme jeune, soit isolée. Des efforts minimes peuvent alors provoquer des fuites urinaires, qui peuvent survenir également en fin de nuit, une fois la vessie pleine ».
Un bilan urodynamique doit alors être réalisé, avec la mesure de la pression de clôture du sphincter, souvent très abaissée (< 20cm d’H2O contre ›60 cm d’H2O chez l’adulte jeune). Le traitement est chirurgical : injections urétrales de gel hydrophile puis ballons Adjustable Continence Therapy (ACT™) chez la femme et ProACT™ chez l'homme, et enfin, dans les incontinences urinaires sévères réfractaires, chez les deux sexes, pose de sphincters urinaires artificiels.
Le piège du détrusor
Outre l’incontinence urinaire, l’âge peut aussi favoriser la rétention urinaire du fait, notamment, de la contraction imparfaite du détrusor, très fréquente au sein de cette tranche d’âge. La miction est généralement lente et il est possible qu’elle soit incomplète. Elle peut aussi s’effectuer par poussée abdominale au lieu d’être due à une véritable contraction du détrusor.
Chez le sujet âgé, ce paramètre est essentiel à prendre en compte lorsqu’on envisage un geste chirurgical pour traiter une incontinence urinaire. Car si le chirurgien pose une bandelette sous-uréthrale, rétro-pubienne ou trans-obturatrice, la bandelette, qui permet une miction normale lorsque le détrusor se contracte, va s’opposer à toutes les fuites liées à un effort et bloquera les mictions lors des poussées abdominales. D’où un risque de rétention en post-opératoire alors que l’intervention est usuelle, efficace et particulièrement bien tolérée chez les adultes plus jeunes.
Il convient aussi dans ce contexte, de faire attention en cas de prescription d’un médicament anticholinergique ou d’injection de Botox® . « La contraction imparfaite du détrusor est une spécificité de la personne âgée?; c’est pourquoi avant tout traitement médical quel qu’il soit et, bien sûr, avant toute intervention chirurgicale, la qualité de la miction et la présence ou non d’un résidu post-mictionnel doivent être évalués », résume Pierre Costa.
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