Être insensible à la douleur peut paraître enviable. Mais lorsqu’il s’agit de l’analgésie congénitale, une rare maladie dont la cause est le plus souvent génétique, c’est un calvaire.
Une équipe internationale vient d’identifier un gène - PRDM12 - dont la mutation est responsable d’insensibilité congénitale à la douleur dans 11 familles. La protéine de ce gène, essentielle pour la perception de la douleur, pourrait offrir une cible prometteuse pour développer de nouveaux types d’analgésiques.
Dès la naissance, les enfants atteints d’analgésie congénitale ne ressentent aucune douleur physique. Or la douleur agit comme un signal d’alarme en présence d’une lésion tissulaire ou d’un contact dangereux, et joue ainsi un rôle crucial dans l’apprentissage du danger.
Les enfants se blessent donc constamment, sans s’en rendre compte ; morsure de langue, brûlure, coupure, fracture, microtraumatismes articulaires, infection... les maux sont multiples (et peuvent être parfois pris pour une maltraitance).
Nouvelle avancée
Plusieurs études ont déjà commencé à dévoiler des causes, comme la mutation de gènes codant pour 3 types de canaux sodium (SCN9A, 10A et 11A). L’équipe internationale des Drs Geoffrey Woods (Université de Cambridge, Royaume-Uni) et Jan Senderek (Université de Munich, Allemagne), dans la revue « Nature Genetics », est à l’origine d’une nouvelle avancée.
Les chercheurs ont d’abord étudié deux familles (pakistanaise et italienne) dont l’arbre génétique concordait avec une analgésie congénitale à transmission autosomique récessive. Après avoir identifié des mutations homozygotes du gène PRDM12 chez les patients de ces 2 familles, des mutations homozygotes de ce gène ont ensuite été découvertes chez 9 autres patients non apparentés en dépistant 160 patients ayant une AC autosomique récessive ou inexpliquée.
Tous les patients étaient incapables de percevoir une douleur aiguë ou inflammatoire depuis la naissance, et tous avaient subi de multiples lésions mutilantes (langue, lèvres, doigts) ainsi que des blessures liées à des traumatismes répétés et des brûlures. Les réflexes de la cornée étaient absents.
Régulateurs épigénétiques
Des études menées chez la souris et sur des cellules humaines (cellules iPS) ont révélé que la protéine PDRM12, connue pour être un régulateur épigénétique, est exprimée dans les nocicepteurs et leurs progéniteurs. L’inactivation du gène chez la grenouille indique que la protéine joue un rôle essentiel dans le développement des neurones sensoriels. La mutation du gène empêcherait la protéine de recruter une méthyltransférase pour modifier l’histone durant la génèse du nocicepteur.
« De plus en plus d’études montrent que des mécanismes de douleur chronique et neuropathique sont corrélés a des altérations épigénétiques dans les circuits nociceptifs périphériques et de la moelle épinière. L’activité modificatrice d’histone de la PDRM12 suggère une cible possible pour développer de nouvelles méthodes antalgiques à travers la reprogrammation des nocicepteurs suractifs », concluent les auteurs.
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