La séance de négociation conventionnelle consacrée au médecin traitant, ce mercredi après-midi, a pris un tour inattendu dans un climat de tension croissante entre les syndicats et l'assurance-maladie.
Les premières pistes de revalorisation des généralistes avancées par la CNAM, privilégiant le passage progressif de la consultation à 25 euros pour les seuls médecins de famille à tarifs opposables (secteur I et signataires du contrat d’accès aux soins), via une majoration, ne font pas l’unanimité chez les syndicats de médecins libéraux.
Cette proposition, même s’il ne s’agit que d’une hypothèse, comme l’a rappelé la CNAM, a eu le don de crisper les positions dès lors qu'elle ne concerne qu'une partie des médecins.
Pas d'équité, peste le SML
Le Syndicat des médecins libéraux (SML) a quitté rapidement la réunion peu après son ouverture. « Le compte n’y est pas, nous ne connaissons pas l’enveloppe dont dispose l’assurance-maladie, il n’y a pas d’équité tarifaire et pour la retraite, rien n’est réglé, a pesté le Dr Éric Henry, son président, peu avant 15 heures. Nous quitterons la négo tant que nous n’aurons pas de réponses. »
Le syndicat défendait l'option (plus coûteuse) du C=CS=25 euros de façon à concerner tous les médecins. Or, la proposition actuelle de la CNAM écarte les généralistes de secteur II, ce que le SML perçoit comme une « discrimination ». Le BLOC déplore également « la volonté très forte de la CNAM de marginaliser et d’exclure le secteur II ». « Cela pose un problème pour la chirurgie, l’anesthésie et l’obstétrique », assure son coprésident le Dr Philippe Cuq.
De façon plus surprenante, le patron de MG France, le Dr Claude Leicher, s'est dit lui aussi contrarié par la tournure des discussions. « Les generalistes ont imposé comme point de départ le C à 25 euros. C'est une revendication forte d'équité mais on est encore loin du compte. Preuve en est que la CNAM veut maintenir un différentiel de rémunération à l'acte des pédiatres par rapport aux généralistes ».
Menace de la CSMF
La CSMF affiche également sa forte déception. « Réduire les attentes de la médecine libérale à deux euros, c’est se moquer des médecins, juge son président, le Dr Jean-Paul Ortiz. Nous réclamons toujours une consultation de base fixée immédiatement à 25 euros avec une hiérarchisation des consultations à 4 niveaux en fonction de leur contenu et nous notons pour que l’instant, rien n’est proposé pour les médecins spécialistes. » La CSMF appelle également de ses vœux un espace de liberté tarifaire pour tous les médecins et menace, si le gouvernement ne prend pas la mesure du « malaise de la profession », de quitter la négociation.
La proposition d’un nouveau « forfait unique de patientèle » en remplacement de l’existant (RMT de 40 euros pour les patients ALD, forfait de 5 euros par patient, majoration pour personnes âgées de 5 euros…) pose aussi question. « On sait ce que l’on touche actuellement et on ne voit pas trop ce que l’on pourrait toucher », observe le Dr Jean-Paul Hamon, président de la FMF. Ce syndicat a décidé d’attendre la tenue de son CA à Paris le 5 juin avant de décider de « poursuivre ou pas cette négociation qui traine en longueur et ne prend pas la mesure du désastre démographique libéral » .
Amertume des spécialistes
Un épisode illustre à quel point la tension est montée d’un cran ces dernières heures. En saluant le directeur de la CNAM, ce mercredi, le Dr Patrick Gasser, patron de l’UMESPE, la branche spécialiste de la CSMF, a marqué d'emblée sa mauvaise humeur et déploré « une attaque en règle », signifiant par là même que le compte n’y est pas pour les spécialistes. « Attendez les deux autres négociations (sur les spécialités cliniques et techniques, NDLR) », lui a répondu le DG Nicolas Revel, avant de s’isoler quelques instants en sa compagnie.
Dernier signe de crispation : la FMF, Le BLOC, le SML et la CSMF auraient décidé de boycotter la réunion ministérielle du 15 juin sur la mise en place du tiers payant, assure la FMF.
« Je ne m’attendais pas à ces réactions, a confié le directeur général au « Quotidien ». La séance du jour est consacrée au médecin traitant, ce n’est pas parce que nous n'abordons pas tous les sujets tout de suite qu’il n’y aura rien sur les spécialités cliniques et techniques! Nous évoquerons la hiérarchisation des actes lors des futures réunions. Le paysage global des propositions de la CNAM va se préciser. »
Les médecins devraient eux aussi se positionner. Les cinq syndicats ont prévu de se réunir pour faire le point sur l’avancée des discussions le 15 juin. Une chose est sûre, le chemin devient étroit jusqu’à la conclusion d’une nouvelle convention.
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