L’acte gériatrique n’est pas réservé aux seuls départements de gériatrie : il se doit d’être proposé dans les différents services de l’hôpital aux patients qui en ont besoin. Un message, illustré dans le cadre d’une étude américaine publiée dans le Journal of American Geriatrics Society. Celle-ci démontre, en effet, que la prise en charge gériatrique des personnes âgées (2) hospitalisées pour une maladie coronarienne est essentielle car elle réduit, de façon significative, leur futur recours aux urgences.
Éviter la réhospitalisation
Le risque de réhospitalisation des patients âgés est, par ailleurs, majoré lorsque ceux-ci sont atteints d’une insuffisance cardiaque, d’un infarctus du myocarde et/ou d’une pneumonie. Chez les personnes âgées souffrant d’une insuffisance cardiaque, les troubles cognitifs représentent également un facteur de réhospitalisation, voire de décès dans les 6 mois qui suivent la première hospitalisation (étude publiée dans The American Journal of Medecine). « Les gériatres doivent mettre leurs compétences au service des cardiologues pour repérer, puis prendre en charge les troubles de la cognition chez ces patients et tenter, ainsi, d’améliorer leur survie », note le Pr Chassagne. Une autre étude (publiée dans Annals of Oncology) met, quant à elle, en exergue la pertinence de l’évaluation gériatrique systématique dans l’évaluation des personnes âgées atteintes d’un cancer.
Outre le cancer, les infections urinaires, la déshydratation, la pneumonie et la septicémie entraînent une surmortalité considérable chez les résidents d’EHPAD souffrant de troubles cognitifs sévères, hospitalisés à plusieurs reprises (étude publiée dans le JAMA). « Faut-il envoyer ces patients à l’hôpital pour leur faire subir une agression supplémentaire alors même qu’ils risquent fort de mourir ? Il faudrait plutôt, à mon sens, augmenter les capacités de soins des EHPAD », commente le Pr Chassagne. Un avis que partage le Pr Pierre Jouanny, « une étude publiée dans le Journal of American Geriatrics Society montre notamment qu’en augmentant le nombre d’infirmières, en formant le personnel et en ayant de la radiologie sur place, dans les EHPAD, beaucoup d’hospitalisations de résidents d’EHPAD seraient évitées ».
Neuroleptiques, des recommandations précises
Concernant la prescription de neuroleptiques en EHPAD, quatre messages, fruits de la synthèse de plusieurs études, peuvent être délivrés. « En EHPAD, il faut utiliser les neuroleptiques modernes, atypiques (et non les neuroleptiques classiques) car on réduit ainsi la mortalité de 40 % », note le Pr Jouanny. Toutefois, les neuroleptiques atypiques ne doivent pas être prescrits de façon systématique aux patients âgés souffrant de démence. « Car ils induisent un risque élevé de fractures et de chutes. Mais on ne peut pas supprimer, pour autant, les neuroleptiques chez tout le monde : certains patients atteints de la maladie d’Alzheimer voient leurs troubles (agitation, déambulation, délires…) réapparaître à l’arrêt du traitement. Les thérapies individuelles (patients atteints d’Alzheimer/neuropsychologue) permettent, par ailleurs, d’atténuer le fardeau de l’aidant et de différer l’entrée en institution des patients », poursuit le Pr Jouanny. Enfin, dernier message fort de l’année : une hypoglycémie significative chez la personne âgée peut entraîner des complications cognitives importantes. Le contrôle glycémique doit donc être plus « souple » chez la personne âgée.
D’après un entretien avec les Prs Philippe Chassagne (CHU de Rouen) et Pierre Jouanny (CHU d’Amiens).
(1) Les références des 10 études analysées sont disponibles sur le site du CNPG : http://www.cnpg2014.com
(2) patients dont le dossier comportait une connotation gériatrique (incontinence, chutes…).
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