La Haute Autorité de santé (HAS) a précisé les conditions d'utilisation des tests antigéniques du Covid-19 dans un avis rendu ce vendredi 9 octobre. L'agence sanitaire a identifié deux situations dans lesquelles le test antigénique peut être utilisé : les patients symptomatiques pour lesquels il n'est pas possible d'obtenir un résultat de test RT-PCR dans un délai de 48 heures et le dépistage dans des populations ciblées (abattoirs, université, suspicion de cluster). Ce nouvel avis contient des ajustements qui répondent aux critiques formulées par plusieurs équipes ayant mené des évaluations sur des tests de ce type, notamment à l'AP-HP et aux Hospices civils de Lyon.
En cas de test positif chez un patient symptomatique sans facteur de risque, « les tests sont suffisamment spécifiques pour que l'on soit sûr qu'il s'agit de Covid-19 et il n'est donc pas nécessaire de confirmer par un test RT-PCR », détaille le Dr Cédric Carbonneil, chef du service d’évaluation des actes professionnels au sein de la direction de l’évaluation médicale, économique et de santé publique de la HAS. En cas de test négatif, la HAS considère « qu'il peut s'agir d'un faux négatif, mais qu'il s'agit vraisemblablement d'un patient non contagieux », poursuit Cédric Carbonneil.
Les patients présentant des facteurs de risque de forme grave de Covid-19 (âge supérieur à 65 ans, diabète, cirrhose, antécédents cardiovasculaires…) suivent un parcours différent. En cas de test négatif, la HAS recommande une consultation médicale, en présentielle ou en téléconsultation, et un test PCR pour confirmer ou infirmer le diagnostic. « Dans cette population, il est important d'être certain qu'il ne s'agit pas de Covid-19 pour ne pas passer à côté d'une infection grave », prévient-il.
Recherche de clusters
La HAS laisse le soin aux sociétés savantes de détailler la manière dont les deux tests doivent être réalisés. Cédric Carbonneil indique toutefois que les données de la littérature semblent privilégier « la réalisation de deux prélèvements nasopharyngés coup sur coup, chacun dans une narine différente. Le premier est utilisé tout de suite pour le test antigénique et le second peut être conservé en vue d'un éventuel test PCR ».
L'autre cas de figure pour lequel est recommandée l'utilisation des tests antigéniques est la recherche de clusters dans des populations ciblées où leur présence est suspectée. En cas de découverte de plusieurs cas positifs à l'aide des tests antigéniques, l'exploration du cluster ainsi découvert se poursuivra à l'aide du contact tracing et des tests RT-PCR. La HAS estime en revanche que les tests antigéniques n'ont pas d'intérêt pour le dépistage de masse en population générale ou pour répondre aux demandes spontanées de dépistage. « En ce qui concerne le dépistage des cas contacts, nous n'y sommes pas favorables pour l'instant en attendant des données complémentaires », complète Cédric Carbonneil.
À utiliser dans les quatre premiers jours de symptômes
Les tests antigéniques visent à détecter la présence d'antigènes, au lieu des brins d'ARN viraux lors d'une RT-PCR. Ils présentent l'avantage d'être réalisables avec peu de matériel et de fournir un résultat en 15 à 30 minutes. « La RT-PCR est un test fiable mais il n'est pas suffisant » dans le contexte de l'épidémie actuelle, a estimé le Pr Dominique Le Guludec, présidente du collège de la HAS qui martèle : « il faut étendre et diversifier nos capacités de test ».
La fiabilité des tests antigéniques est cependant remise en question par plusieurs médecins, à commencer par l'hôpital Henri-Mondor (AP-HP) qui ne les avait pas jugés assez performants pour être employés comme test unique de diagnostic. Au cours de leur évaluation, les chercheurs avaient constaté qu'aucun des six tests passés au crible ne dépassait le seuil de 80 % de sensibilité fixé par la HAS dans son précédent avis du 25 septembre s'ils étaient réalisés au-delà de trois jours après l'apparition des symptômes.
Face à ces critiques, la HAS a revu sa position, et considère désormais que les tests antigéniques doivent impérativement être utilisés dans les 4 jours qui suivent l'apparition des symptômes, contre 7 jours dans son précédent avis.
« Dans un contexte de dépistage au cours d'une pandémie, nous avons besoin de tests très spécifiques capables de dépister rapidement un nombre important de personnes », précise Cédric Carbonneil, pour qui les tests antigéniques répondent aux impératifs actuels de santé publique.
« Les tests suffisamment sensibles existent »
L'étape suivante pour la mise en application de ces recommandations sera une sélection, par les services du ministère, des tests répondant aux critères de la HAS. « Il y aura aussi un circuit financier, car il y aura une nécessité de rembourser l'acte de prélèvement et de test », précise Cédric Carbonneil. La validation des critères ne pourra se faire sur la seule foi des données des fabricants et devrait donc être soumise à une évaluation extérieure.
Mais des tests répondant aux critères de la HAS existent-ils ? Le Pr Jean-Michel Pawlotsky, chef du service de virologie de l'hôpital Henri-Mondor en a douté dans un entretien qu'il a accordé au « Quotidien du Médecin », de même que le Pr Bruno Lina, virologue au CHU de Lyon.
Pour Cédric Carbonneil, ces tests existent : « nous avons fait une revue systématique de la littérature, nous explique-t-il, en discriminant les résultats fiables des non fiables. Nous n'avons retenu que des analyses faites en double aveugle sur prélèvements frais, et des protocoles respectant les consignes du fabricant et du marquage CE. On a ainsi pu déterminer qu'il existait des tests satisfaisants en termes de performance. »
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