La verticalité de l’homme défie les lois de la gravité. Du coup, avec le vieillissement de la colonne vertébrale, le surpoids, les mauvaises positions, la sédentarité ou l’excès de travail physique en tension…, le dos « prend cher ». Résultat, certains d’entre nous, de plus en plus nombreux, souffrent de douleurs affectant la région lombaire. Et ces douleurs, quand elles se chronicisent, peuvent être la source d’un véritable handicap non seulement dans certaines activités mais aussi dans la vie de tous les jours, au travail, à la maison. Et affecter plus largement l’ensemble de la vie psychosociale d’un individu.
Or malgré l’apport des antalgiques, anti-inflammatoires, de la kinésithérapie, du yoga, de la psychothérapie, de la sophrologie… voire même de la chirurgie - sous réserve que l’indication soit bien posée vu l’absence de corrélation entre imagerie et douleur - certains patients restent hyperalgiques et vivent parfois un véritable enfer. C’est pourquoi les recherches continuent.
De nombreuses données suggèrent que ce mal de dos chronique rebelle est, en partie du moins, lié à une modification adaptative des interactions entre système nerveux central et fibres périphériques. Avec à la clé un excès de réponse nociceptif ou hypersensibilité aux douleurs tant mécaniques que neuropathiques. Partant de là, interrompre ou moduler ce signal semble une piste séduisante.
C’est l’idée princeps qui a conduit dès les années soixante-dix à tester la stimulation spinale des fibres de la moelle épinière. Une opération menée avec des milliers d’implants et ciblant, dans les lombalgies, la paresthésie de la partie douloureuse. Une opération délicate d’autant qu’anatomiquement il existe peu de fibres dédiées au bas du dos. Changeant leur fusil d’épaule, des chercheurs de Stanford (États-Unis) ont eu l’idée de stimuler non plus les fibres médullaires mais les racines nerveuses. Avec l’espoir d’induire ainsi une désensibilisation au niveau du système nerveux central. Pari réussi semble-t-il.
La première implantation chez l’homme a eu lieu en 2008. Très vite ont été observés des effets spectaculaires sur les douleurs lombaires, sans complications majeures notamment pas de paresthésies.
Aujourd’hui une nouvelle option de stimulation spinale utilisant des hautes fréquences (jusqu’à 10 kHz) élargit encore le champ des possibles.
Les résultats de l’étude multicentrique européenne menée sur 80 sujets implantés en ouvert - dont 4 sur 5 (80 %) après échec d’une chirurgie du rachis - ont été présentés à Maastricht.
À 6 mois, leur score douloureux moyen évalué sur une échelle visuelle (EVA) est passé sur le plan lombaire de 8,4 à 2,7 (p ‹ 0,001) et au niveau des jambes de 5,4 à 1,4 (p ‹ 0,001). Et près de 75 % des patients ont vu leur douleur lombaire réduite de plus de moitié (1).
Au terme de 2 ans de suivi, sur les 72 patients (90 % des répondeurs à 6 mois) toujours suivis, le bénéfice persiste. Au plan lombaire le score EVA moyen est à 3,3 (± 0,3) contre 8,4 (± 0,1) avant implantation (p ‹ 0,001). Et les patients se disent très satisfaits (2). Un beau succès donc…
Reste toutefois encore à valider plus étroitement cette nouvelle méthode. Après les déboires rencontrés avec la dénervation rénale, ex-nouvelle star dans l’hypertension résistante, mise à nue par l’étude randomisée en double aveugle utilisant une procédure fantôme (SIMPLICITY), la prudence reste de mise.
JP Van Buyten et al. High frequency spinal cord stimulation.
(1) JP Van Buyten et al. Neuromodulation 2013;16:59-65;
(2) A Al-Kaisy et al. Pain Med. 2014;15(3):347-54.
Article suivant
Le bon, la brute et le truand
La nouvelle star dans les lombalgies chroniques sévères rebelles
Le bon, la brute et le truand
L’impact des "réponses comportementales" des parents
Algorithme de traitement
Le grand mystère
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024