Pour mémoire ces douleurs touchent surtout les adolescents les plus âgés, les filles (80 %) plus souvent hyperactives (hypermobilité/sport) ou inactives et les garçons inactifs, et les fumeurs/fumeuses. Mais le propre vécu douloureux des parents et leur approche de la douleur de leur adolescent pèsent aussi. Alors que les facteurs socio-économiques ne semblent avoir aucun impact. C’est ce qu’il ressort d’une étude norvégienne (1) menée dans la cohorte HUNT rassemblant tous les habitants du comté du Nord-Trondelag. Au total, 11 000 personnes de plus de 13 ans ont été invitées à y participer. Au final, l’étude porte 5 370 adolescents âgés de 13 à 18 ans ayant au moins un parent prêt à participer.
Le critère primaire est la douleur chronique non spécifique (non liée à une maladie ou une blessure) ayant perduré au moins une semaine dans les 3 derniers mois. La douleur chronique est dite multisite dès qu’il y a au moins 3 sites douloureux.
« L’analyse met en évidence l’influence de la structure familiale, témoignant de l’impact du "modèle douloureux familial" et des facteurs environnementaux partagés », résume Jeanine Verbunt (Maastricht, Pays-Bas). « Avoir un parent douloureux augmente le risque, (RR = 1,5 ; 1,3-1,8 pour une mère douloureuse). Avoir deux parents douloureux encore plus. Néanmoins, dans les familles monoparentales, seules les mères pèsent sur le risque, le père pas tant que ça ».
« Les facteurs de risque de douleurs invalidantes chez l’adolescent sont le catastrophisme, la peur et l’intensité de la douleur, et la dépression. Or le rôle de la peur a été bien étudié chez l’adulte et récemment confirmé chez l’adolescent », souligne J Verbunt.
Et les parents influent sur cette peur. « La sollicitude, le découragement, la promotion de réponses d’évitement (favoriser les activités tenant compte de ces douleurs) parentales majorent le risque de handicap ».
Côté père c’est le manque de sollicitude qui ressort quand côté mère c’est le découragement ; quand les parents s’inquiètent les mères ruminent tandis que les pères usent de stratégies de distraction. « Néanmoins, dans les deux cas, la restriction d’activité induite est manifeste. Au test de marche de 2 minutes, le père comme la mère tentent de stopper précocement l’adolescent. Ils le font très probablement aussi dans les activités de la vie de tous les jours, souligne J Verbunt. C’est pourquoi, les traitements qui utilisent une réadaptation multimodale intégrant un travail sur la peur de la douleur sont très intéressants ». En 2004 un travail allemand a démontré son efficacité sur des enfants très handicapés (3). Aujourd’hui, une étude (2 B Active), lancée dans 4 centres au Pays-Bas, va le tester chez les adolescents souffrant de ces douleurs musculosquelettiques. Affaire à suivre.
J Verbunt. How to deal with pain in adolescents: new pathways.
(1) G Hoftun et al. Association of Parental Chronic Pain With Chronic Pain in the Adolescent and Young AdultFamily Linkage Data From the HUNT Study. JAMA Pediatr. 2013 ;167:61-69.
(2) The Importance of the Family Environment in Pediatric Chronic Pain. JAMA Pediatr. 2013 ;167:93-94.
(3) R K Wicksell et al. Evaluating the effectivness of exposure and acceptance strategies to improve functionning and quality of life in longstanding pediatric pain: A ranomized controlled trial. Pain 2014;155:118-28.
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