Souvent considérée comme une évidence, l’implication des facteurs psychologiques reste en fait à prouver
« les syndromes douloureux régionaux complexes (SDRC) constituent un modèle de recherche intéressant pour éclairer l’impact des facteurs de risque "biomécaniques" et les facteurs environnementaux psychosociaux à la fois dans les douleurs aiguës et chroniques », a expliqué Robert Perez (Pays-Bas)
C’est en effet une entité clinique à part entière de présentation typique mais rassemblant plusieurs sous types. Soit au total une maladie très hétérogène.
« La douleur fait partie de notre système de fonctionnement. Elle nous fait réagir pour nous mettre hors de danger. C’est le rôle des "entrées" (input) douleur. Toutefois, différencier entre réaction "normale" et "exagérée" à la douleur est délicat. On n’a pas tous le même passé, le même vécu douloureux… Notre réactivité peut évoluer avec notre vécu, c’est une sorte d’apprentissage. Manifestement de multiples facteurs moduleraient notre réponse. C’est un thème qui passionne d’ailleurs les chercheurs depuis fort longtemps. En 1 864 déjà, on en débattait après être passé de la théorie purement mécanistique à une théorie multifactorielle ouvrant de nombreuses perspectives ».
La classification en 3 sous-types ajoute encore à cette complexité :
- type 1 : troubles vasomoteurs prédominants ;
- type 2 troubles sensitifs (allodynie et hyperalgie) prédominants ;
- type 3 regroupant un florilège de symptomatologies.
Les facteurs de risque n’étant pas nécessairement les mêmes.
Pourtant, même en se cantonnant aux seules algodystrophies de type 1, le mystère reste entier.
Les algodystrophies de type 1 ont une prévalence d’environ 20-25/100 000 sujets/an. Parmi elles, 1 sur 50 se pérennise (chronicité). Globalement, elles touchent 4 fois plus de femmes que d’hommes. Enfin, 4 fois sur 5, un antécédent traumatique (fracture, opération) ou non traumatique (thrombose, infarctus…) est retrouvé. Ce qui laisse tout de même 10 à 20 % d’algodystrophies « spontanées » (1,2).
L’implication de facteurs de risque psychologiques n’est pas formellement prouvée. Dans une méta-analyse de 31 études, publiée en 2009 (3), les quelques essais prospectifs ne mettent pas évidence de relation avec la dépression, l’anxiété, la neurasthénie ou la colère. Les études rétrospectives donnent des résultats contradictoires. La plupart ne trouvent néanmoins aucune corrélation et les plus rigoureuses concluent même à l’absence de corrélation. Seuls les événements de la vie semblent favoriser l’algodystrophie de type 1. « On a besoin d’études plus vastes et documentées pour faire la preuve ou écarter définitivement les facteurs de risque psychologiques », selon R Perez.
En revanche, d’autres facteurs de risque ont été mis en évidence ; l’asthme, les migraines, l’ostéoporose, les problèmes menstruels, les neuropathies mais aussi les prescriptions d’IEC avec un risque relatif multiplié d’un facteur 3 à 4, plus important aux fortes posologies (2)
Les facteurs pronostiques ne sont guère mieux connus. Mais dans une cohorte française récente, la douleur postopératoire resort.
« Peut-être à l’avenir faut-il donc examiner l’impact des douleurs postopératoires. Plutôt que stigmatiser les patients ! » conclut R Perez.
R Perez. Physical and psychlogical risk factors for CRPS I.
(1) De Mos et al. Pain 2007.
(2) De Roodj et al. Pain 2007.
(3) A Beerthuizen et al. Is there an association between psychological factors and the Complex Regional Pain Syndrome type 1 (CRPS1) in adults? A systematic review. Pain 2009;145:52-9.
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