En matière de dénutrition, le 4e Programme national nutrition santé (PNNS4) 2019-2023 fixe des objectifs ambitieux : une réduction minimale de 15 % pour les plus de 60 ans et de 30 % pour les plus de 80 ans. Et 20 % de malades dénutris en moins en sortie d'hospitalisation. « Pour atteindre ces objectifs, il faut sensibiliser la population, les tutelles, les politiques, les facultés de médecine, les patients, mais aussi, les professionnels de santé. Peu de médecins abordent la question de la dénutrition en consultation et la perte de poids du patient âgé est souvent banalisée », souligne la Pr Agathe Raynaud-Simon, chef du département de gériatrie (GH Bichat, Beaujon et Bretonneau, Paris). Or, au cours du vieillissement, la perte de poids n'est jamais physiologique. Elle est liée à des pathologies : cancers, insuffisances d’organe sévères, dépression… Et souvent, à l'association de multiples facteurs : troubles bucco-dentaires, douleurs articulaires, isolement social… La perte de poids conduit ainsi à un état de fragilité et à des complications médicales fréquentes et graves.
Favoriser une prise en charge précoce
Pour stopper ce cercle vicieux, l'entourage de la personne âgée (famille, infirmiers, aides-soignants, aides à domicile, généralistes) joue un rôle clé. « Tous doivent être attentifs à la perte de poids, même mineure, afin de favoriser une prise en charge médicale précoce », note la Pr Raynaud-Simon. Le dépistage de la dénutrition s'effectue via le calcul du poids, de la perte de poids et de l'indice de masse corporel (IMC). Il peut également être réalisé grâce au questionnaire Mini Nutritional Assessement (MNA). « Le MNA comporte 6 questions simples (appétit, poids, IMC, mobilité, état de santé) qui permettent de suspecter une dénutrition. Or, il n'est pas assez utilisé par les professionnels de santé », affirme la Pr Raynaud-Simon. Le diagnostic de la dénutrition repose sur la présence d'un ou plusieurs des critères suivants : perte de poids supérieure à 5 % en 1 mois ou 10 % en 6 mois, IMC inférieur à 21, albuminémie inférieure à 35 g/l.
Améliorer le pronostic des patients
La lutte contre la dénutrition commence par des conseils diététiques simples (3 repas équilibrés par jour, aliments riches en énergie et protéines, collations) et, éventuellement, une aide pour faire les courses, la cuisine et s'alimenter. L'adaptation individuelle de l'alimentation enrichie est au mieux faite par un diététicien. Si cela ne suffit pas à reprendre du poids, des compléments nutritionnels oraux (CNO) doivent être prescrits. Pour une efficacité clinique optimale, ils doivent fournir l'équivalent d'au moins 400 calories par jour et/ou 30 grammes de protéines par jour. « De plus en plus d'études médico-économiques montrent que les CNO n'augmentent pas les coûts de santé car ils permettent de limiter les complications médicales. Il ne faut donc pas hésiter à les prescrire, si nécessaire. Par ailleurs, dans une étude récente (1), nous avons montré que la prise de CNO peut réduire de 3 à 5 fois le risque d'être hospitalisé », précise la Pr Raynaud-Simon. Enfin, lorsque l’alimentation orale est impossible ou insuffisante et que la situation médicale le justifie, la nutrition entérale doit être envisagée.
(1) Seguy D et al., Clinical Nutrition, https://doi.org/10.1016/j.clnu.2019.08.005
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