LES SPÉCIALISTES À RISQUE, las d’être exposés à des trous de garantie, réclament une couverture intégrale du risque. Ils veulent en outre que leur reste à charge assurantiel ne dépasse pas 5 000 euros par an. Xavier Bertrand a promis de régler le problème en 2011. Définitivement. Le ministère de la Santé planche sur la question, sans rien dévoiler de ses intentions. L’effervescence perçue ces derniers jours par des syndicalistes serait-elle le signe d’un dénouement imminent ? Le gouvernement, selon certaines sources, pourrait déposer à l’Assemblée un amendement de dernière minute, afin de corriger – ou de compléter – les mesures d’ores et déjà inscrites au sein de la proposition de loi Fourcade. Qui, aux yeux de Bercy, va trop loin.
L’amendement déposé par la députée UMP Valérie Boyer, et adopté en commission des affaires sociales, prévoit l’abandon des recours de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) contre les médecins, ainsi que l’instauration, dès 2013, d’une mutualisation du risque médical lourd. Deux mesures radicales, qui satisfont le corps médical. D’aucuns y voient d’ailleurs la main de certains médecins influents. « Cet amendement dit tout et son contraire, il paraît téléguidé par les syndicats », estime cette source qui requiert l’anonymat. Valérie Boyer, un temps tentée de réécrire son amendement, maintient aujourd’hui sa position.
Faut-il supprimer les recours de l’ONIAM ? Ce député UMP y est favorable. « C’est un frein à la sérénité des médecins », dit-il. Mais Bercy, y voyant un manque à gagner pour l’ONIAM, s’y oppose. « Il va y avoir un débat au Parlement », déclare le parlementaire. Qui promet de donner de la voix : « Cela fait des années qu’on tourne en rond. On va crier qu’il faut régler le problème une bonne fois pour toutes. » Pour cet autre connaisseur du dossier, l’amendement Boyer est incomplet : « On cherche une solution qui passe par une mutualisation large qui tranquillise les obstétriciens. Il faut encore un peu de travail pour trouver comment éliminer tous les trous de garantie. »
Une question de timing.
La proposition de loi Fourcade arrive sans doute un peu vite pour le gouvernement, divisé sur le dossier. D’un côté, le ministère de la Santé, soucieux de donner des gages aux libéraux, ne dit pas non aux mesures supprimant les trous de garantie. La piste de l’écrêtement – c’est-à-dire l’indemnisation des sinistres par la solidarité nationale au-delà d’un certain plafond – n’est pas écartée. D’un autre côté, le Trésor tient les cordons de la bourse, et tente dans le même temps de ménager les assureurs, qui ne veulent entendre parler ni du pool, ni de l’écrêtement.
Les assureurs eux-mêmes sont divisés. La compagnie irlandaise MIC a boudé les deux réunions organisées en mars par Bercy pour débattre des propositions de Gilles Johanet. Le relèvement des plafonds réglementaires de garantie est envisagé (actuellement, un sinistre est couvert pour au minimum 3 millions d’euros), ce qui pourrait déstabiliser MIC, et donc l’ensemble du marché de la RC médicale, puisque MIC assure près de 7 000 anesthésistes, chirurgiens et obstétriciens. Cette piste-là ne séduit guère les médecins, qui craignent que les assurances en profitent pour augmenter leurs primes.
Le dernier rapport Johanet préconisait une dizaine de propositions, dont certaines – comme la clarification annuelle des provisions des assureurs – ne sont aujourd’hui nullement évoquées. Le gouvernement procédera peut-être par étapes. D’abord une mesure ou deux via la loi Fourcade, puis un second de train de réforme, à l’automne. « J’aimerai aller plus vite que le PLFSS, disait Xavier Bertrand en mars dans nos colonnes. Différentes options sont sur la table, je ne suis fermé à rien. La piste de la mutualisation m’intéresse. »
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