Une implication probable des hormones féminines

L'asthme au cours de la vie génitale

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Publié le 19/05/2016
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Les variations de l’asthme au cours de la vie génitale chez la femme suggèrent une influence hormonale.  L’asthme est en effet plus fréquent chez les filles après la puberté comme plus largement chez la femme à l’âge adulte, avec un début plus volontiers tardif que chez les hommes. Parallèlement, les formes atopiques sont moins fréquentes.

Physiopathologiquement, les estrogènes et  la progestérone ont un impact sur le tonus musculaire bronchique et sur l’inflammation des voies aériennes. Les estrogènes sont pro-inflammatoires à faible concentration mais anti-inflammatoires à forte concentration. La progestérone est, elle, plutôt pro-inflammatoire et l’équilibre progestérone/estrogènes joue ainsi un rôle dans la réponse inflammatoire et la réponse immune aux allergènes de l’environnement.

 

Formes prémenstruelles

 

Chez toutes les femmes, la fonction respiratoire varie au cours du cycle menstruel et chez les patientes asthmatiques, on observe fréquemment une exacerbation des symptômes en période pré-ovulatoire et à la fin de la période lutéale.

L’asthme prémenstruel associe une aggravation des symptômes en période prémenstruelle et une diminution du volume expiratoire maximum seconde (VEMS) et/ou du débit expiratoire de pointe (DEP). Selon une enquête réalisée sur plus de 1200 femmes asthmatiques âgées de 12 à 55 ans, 11 % souffriraient d’asthme prémenstruel, responsable d’une plus grande fréquence de passage aux urgences et de recours aux bêta-2 mimétiques de courte durée d’action.

Le données issues de la cohorte SALPADIA 2, qui a étudié l’hyperréactivité bronchique sur 571 femmes 3 jours avant et 3 jours après les règles, confortent l’hypothèse d’un rôle des hormones sur la réactivité bronchique.

Les stratégies thérapeutiques sont assez limitées. La prise d’antileucotriènes peut apporter une amélioration chez les femmes ayant une baisse du DEP et un taux de leucotriènes C4 élevé en période prémenstruelle. La contraception orale peut avoir un effet bénéfique, notamment en réduisant les variations de DEP.

 

Au cours de la grossesse

 

La grossesse constitue également une période particulière pour les asthmatiques. Selon les études, de 3 à 12 % des femmes enceintes seraient concernées par  l’asthme, qui représente ainsi la maladie chronique la plus fréquente au cours de la grossesse. Dans un tiers des cas l’asthme tend à s’aggraver, dans un tiers des cas à s’améliorer, tandis qu’il reste stable dans le dernier tiers des cas. A côté des variations hormonales, d’autres facteurs peuvent être en cause, notamment le reflux gastro-oesophagien, mais aussi l’arrêt intempestif des traitements de fond. « L’évolution de l’asthme au cours de la grossesse est assez reproductible  chez une même femme au fil des grossesses,  mais nous ne disposons pas de facteurs prédictifs d’évolution », a indiqué le Dr Philippe Bonniaud, Dijon.

Prématurité et petit poids de naissance sont les deux principaux risques associés à l’asthme maternel, en particulier en cas d’exacerbations. Mais l’asthme expose également à un risque accru d’d’hypertension artérielle gravidique (risque doublé) et de césarienne en urgence (OR de 1,29).

Ces données soulignent l’importance d’un suivi étroit des femmes enceintes asthmatiques, chez lesquelles il n’y a pas de restriction en termes de corticoïdes inhalés. L’usage des bêta-2 mimétiques, de courte ou de longue durée d’action, en privilégiant la voie inhalée,  est également de mise.

La ménopause, enfin, est une autre période de la vie génitale où l’asthme peut poser des problèmes de prise en charge. Son incidence est de 1,15 cas/1000 femmes/an, il est moins souvent atopique, plus fréquemment sévère et associé à une polypose nasosinusienne.

D’après les communications des Drs Philippe Bonniaud (Dijon), Cecilia Nocent-Ejnaini, (Bayonne) et Anne Prudhomme (Tarbes)

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du médecin: 9497