Diabète

Trois cibles d’HbA1C

Publié le 17/11/2017
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La moitié des diabétiques français ont plus de 65 ans, et un quart dépasse 75 ans. Parmi cette population très hétérogène, pour une prise en charge optimale, le mot d’ordre est de privilégier l’âge physiologique et non pas chronologique.

La progression de l’espérance de vie a conféré une véritable dimension gériatrique à la maladie diabétique, avec une prévalence de 17,7 % chez les hommes et de 11,5 % chez les femmes entre 70 et 79 ans. Cependant, tout sépare la personne diabétique de 65 ans en bonne santé de celle, plus âgée, institutionnalisée et souvent polypathologique. « C’est pourquoi chez le diabétique, l’évaluation gériatrique standardisée est un préalable indispensable afin de fixer les objectifs glycémiques et les thérapeutiques qui en découlent », souligne le Pr Bernard Bauduceau, co-coordinateur de la cohorte de diabétiques âgés GERODIAB (hôpital d’instruction des armées de Saint-Mandé).

L’hypoglycémie, ennemie n°1

À l’instar de la HAS et de l’ANSM en 2013, la Société Francophone du Diabète en octobre 2017 sur la « prise en charge médicamenteuse de l’hyperglycémie du patient diabétique de type 2 » a récemment catégorisé en trois groupes cette population des seniors. Ainsi, l'HbA1c doit être inférieure ou égale à 7 % chez des malades en « bonne santé, autonomes et à l’espérance de vie satisfaisante » ; inférieure ou égale à 8 % chez les sujets « fragiles » ; et inférieure à 9 % (et/ou glycémies capillaires préprandiales entre 1 et 2 g/L) pour les « personnes dépendantes et/ou à la santé très altérée en raison d’une polypathologie chronique ».

Alors que le senior sans comorbidité, avec une histoire récente de diabète de type 2 et dont l’espérance de vie dépasse 15 ans peut se conformer à la stratégie thérapeutique définie pour l’adulte en bonne santé, celle chez le diabétique âgé répond à des préoccupations bien particulières. Tout d’abord, aucun régime restrictif n’est conseillé. C’est d’ailleurs la raison qui motive les experts à réserver la prescription d’un analogue du GLP1, du fait de son effet pondéral, aux seniors « en bonne santé » et préférentiellement en surpoids. Ensuite, des objectifs glycémiques trop stricts et certaines molécules favorisant la survenue d'hypoglycémies doivent être écartés. Pour cette raison, le répaglinide et les sulfamides n’ont pas les faveurs des spécialistes. « Les hypoglycémies sont fréquemment silencieuses ou méconnues chez les seniors, alors même que leur gravité est attestée sur le plan cardiologique et neurologique, ajoute le Pr Bauduceau. À ces âges, existe une difficulté supplémentaire : la symptomatologie est souvent frustre ou atypique, se manifestant par des troubles du comportement, comme une agressivité ou une confusion ».

Selon le profil

En ce qui concerne le choix thérapeutique, la metformine demeure le traitement de première ligne. En cas d’échec à atteindre l’objectif d’Hba1c fixé, l’ajout d’un inhibiteur de la DPP4 est privilégié du fait de l’absence de risque hypoglycémique puis, en dernier recours, une insulinothérapie basale doit être mise en œuvre. Les comorbidités entrent souvent dans le jeu. L’insuffisance rénale sévère (FDG 15-30 ml/min/1,73 m2) complique le traitement du diabète de type 2, car elle contre-indique la très grande majorité des antidiabétiques oraux. Au stade d’IRC sévère, seuls l’insuline, le répaglinide, le liraglutide et la vildagliptine (50 mg/jour) peuvent être utilisés. Au stade d’IRC modérée, il s’agira plutôt d’ajustements de la posologie, avec la dose maximale de 1 500 mg/j pour la metformine et de 50 mg/j pour la vildagliptine et la sitagliptine.

Gare à l’insuffisance cardiaque

Pour les patients en prévention cardiovasculaire secondaire, lorsqu’un analogue du GLP1 s’impose, le liraglutide se démarque car il est le seul à avoir démontré son impact sur la réduction des événements cardiovasculaires majeurs (étude LEADER). Néanmoins, en cas d’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection diminuée, les analogues du GLP1 sont à éviter car ils accélèrent le rythme cardiaque et un effet défavorable a été démontré avec le liraglutide (études FIGHT et LIVE). Dans ce cas de figure, la sitagliptine est la seule molécule parmi les inhibiteurs de la DPP4 à avoir démontré sa sécurité d’emploi, notamment en matière d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque (étude TECOS), contrairement à la saxagliptine. Pour rappel, cette pathologie est la première cause de mortalité chez le diabétique âgé, selon des données sous presse issues de la cohorte GERODIAB.

Hélène Joubert

Source : lequotidiendumedecin.fr