« Les gourmets français informés par leur réseau de surveillance de santé publique sur les dangers de l’ouverture des huîtres », titrait, un peu moqueur, le quotidien britannique « The Telegraph » en 2008. Il est vrai que les plaies par couteau à huîtres font l’objet, comme tous les accidents de la vie courante, d’une surveillance continue en France par l’InVS.
En 2013, l’EPAC (Enquête Permanente sur les Accidents de la vie Courante) avait recensé 424 accidents liés à l’ouverture d’huîtres survenus entre 2004 et 2012 dans une dizaine de services d’urgences de la métropole. Grâce à ce travail, on connaît le profil type du patient : il s’agit d’un homme trois fois sur quatre, adulte (38 % entre 30 et 44 ans et 32 % entre 45 et 59 ans) qui se blesse dans 30 % des cas au cours du mois de décembre (22 % entre les 24 décembre et le 1er janvier).
Les lésions étaient généralement peu sévères et elles ont été traitées aux urgences : plaies, écorchures, lésions tendineuses et musculaires. Dans 7 % des cas, une hospitalisation courte est nécessaire.
Ce chiffre est très sous-estimé puisqu’il est fondé sur une déclaration des médecins. La Société Française de Chirurgie de la Main estime pour sa part que 1 000 accidents de ce type surviennent chaque année,
explique au « Quotidien » le Pr Philippe Pélissier (CHU Bordeaux).
Les couteaux à huîtres peuvent induire deux types de lésions : des plaies ou des contusions tendino-nerveuses. C’est à la base du pouce que surviennent majoritairement les plaies qui ont pour particularité d’être en général punctiformes.
La peau, les vaisseaux, les nerfs et les tendons peuvent être concernés. Ces derniers sont rarement totalement sectionnés et ils se rompent secondairement.
Les contusions tendino-nerveuses sont un type assez nouveau de lésions fermées par couteau à huîtres. Elles surviennent chez des personnes qui portent des gants renforcés et chez qui le traumatisme survient à très haute énergie sans causer de plaie. Ces lésions peuvent induire des tendinites post-traumatiques ou des anesthésies transitoires.
Exploration d'une plaie : le tendon fléchisseur est au milieu et le paquet vasculo-nerveux collatéral est isolé sur un lac en silicone jaune. (Crédit : Pr Philippe Pélissier)
Les plaies par couteau à huîtres sont dites hyper-septiques. Elles ont tendance à s’infecter très rapidement, causant des phlegmons qui peuvent laisser des séquelles fonctionnelles, et ce d’autant plus que l’intervention chirurgicale est tardive
ajoute le Dr Marc Juvespan (Institut Français de chirurgie de la main, Paris).
Toute plaie de la main doit être explorée au bloc opératoire par un chirurgien de la main,
ajoute le Pr Pélissier.
Un maillage d’établissements spécialisés en chirurgie de la main a été mis en place en France. Les patients doivent être référés à un chirurgien dans les 48 h. Mais pour limiter le risque, il est aussi possible de diffuser auprès de la population des techniques différentes d’ouverture des huîtres et avec mon confrère le Pr Vincent Pinsolle, nous avons proposé une méthode alternative qui exclut des doigts du trajet du couteau et qui a été publiée par la revue « Journal of Hand Surgery » [1].
[1] Pinsolle V, Pélissier P. Open the Oyster, Not the Hand. J Hand Surg [Br] 2006 31: 576 DOI: 10.1016/J.JHSB.2006.05.008
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