« LE cancer colorectal (CCR) est une maladie du sujet âgé : l’âge médian est de 72 ans chez les hommes, 75 ans chez les femmes et l’augmentation de son incidence est directement liée au vieillissement de la population. Sa prise en charge est devenue un problème de santé publique », rappelle le Pr Emmanuel Mitry.
Les formes localisées sont de diagnostic plus tardifs chez les patients plus jeunes, souvent révélées par des complications. Mais la majorité des patients âgés peut aujourd’hui bénéficier d’un traitement chirurgical, dont la mortalité postopératoire a été réduite. Une chimiothérapie adjuvante n’est pas validée dans cette population et dépend de l’état physiologique du patient. Elle peut être licite chez les sujets autonomes sans comorbidités, elle nécessite une expertise oncogériatrique chez les sujets âgés à risque intermédiaire, elle est non prioritaire chez les patients avec comorbidités.
En revanche, dans le CCR métastatique, deux essais cliniques de phase III se sont intéressés à la population âgée. Le premier est l’étude randomisée de la Fédération francophone de cancérologie digestive (FFCD 2001-02). Elle a comparé deux protocoles de chimiothérapie de première ligne chez les plus de 75 ans, avec des critères oncogériatriques à l’inclusion : protocole standard LV5FU2 (5FU- acide folinique) vs chimiothérapie intensifiée avec de l’irinotécan, qui améliore la survie globale chez les patients plus jeunes. Entre juin 2003 et mai 2010, 282 patients d’un âge médian de 80 ans y ont été inclus. Le critère d’évaluation était la survie sans progression avec maintien de la qualité de vie et de l’autonomie. Même si on a observé une petite tendance à l’amélioration de la survie sans progression, elle n’est pas significative (7,3 vs. 5,2 mois, HR = 0,84, p = 0,15). Les effets secondaires sont plus fréquents, notamment la diarrhée, dont les conséquences sont potentiellement délétères chez les sujets âgés. « Le standard doit donc rester une chimiothérapie à base de 5FU », précise le Pr Mitry.
Les résultats du second essai (AVEX) ont été présentés fin janvier au congrès de l’ASCO-GI. Cette étude a évalué, chez des patients de plus de 70 ans, l’impact de l’adjonction d’une thérapie ciblée (bévacizumab) à une chimiothérapie standard (capécitabine). L’association chimiothérapie et thérapie ciblée permet d’améliorer significativement la survie sans progression, critère primaire d’évaluation : 9 vs 5,1 mois (HR = 0,53), au prix d’une toxicité acceptable (effets secondaires connus). Une tendance à une augmentation de la survie globale est également observée. « Cette association peut donc se discuter chez les sujets âgés ayant un CCR métastatique et pour lesquels un traitement du cancer est considéré comme licite », conclut le Pr Mitry.
D’après un entretien avec le Pr Emmanuel Mitry, Institut Curie, Paris.
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