LE QUOTIDIEN : Vous réunissez votre 61e congrès national avec la santé publique pour fil rouge. Quelles sont vos demandes au ministre de la Santé ?
Dr FRÉDÉRIC VILLEBRUN : Pour l'instant, les centres de santé sont un peu hors du jeu de la concertation. Nous souhaitons être mieux pris en considération, défendre et valoriser le rôle des centres de santé en tant qu’acteurs de la santé publique sur le terrain et dans les soins primaires. Nos objectifs sont inscrits dans le code de santé publique mais le cahier des charges reste flou. Par exemple, nous n’avons pas l’obligation de développer ces actions de santé publique, on voudrait que cela soit beaucoup plus affirmé.
Il faut aussi que l’on puisse mieux distinguer, parmi les centres de santé, ceux qui ont un véritable rôle de « service public territorial de santé », et les autres qui n'ont pas ces missions de service public, y compris certains centres dits « déviants ». Il faut que les pouvoirs publics disent clairement qu'ils confient des actions de prévention et de santé publique à telles ou telles structures, en contractualisant avec elles, en lien avec d'autres acteurs de prévention comme les CPTS par exemple.
Quels types d’actions voudriez-vous développer ?
Nous faisons à la fois de la prévention secondaire (dépistage des cancers, IST, tuberculose, etc.) et de la prévention primaire (vaccination, diabète, maladies cardiovasculaires, etc.). Ces dernières actions méritent d’être développées de façon plus significative. Elles sont inhérentes au métier de généraliste mais se font trop à l’échelle individuelle ! Il faut être plus ambitieux dans « l’aller vers » les populations isolées et pas simplement attendre qu’elles soient incluses dans une action de prévention.
Quand on voit un patient en consultation, la prévention n’est malheureusement pas la priorité car le patient a déjà des motifs de consultation beaucoup plus lourds. Mais les centres de santé pourraient être les "maîtres d’ouvrage" de ces projets de prévention, en aidant les médecins volontaires à être des acteurs de santé publique sur le terrain, avec une approche populationnelle. Quand on est rémunéré à la fonction dans un centre de santé, comme nous le demandons, on peut prendre le temps pour mettre en pratique cette stratégie populationnelle. Ce n’est pas possible quand on est rémunéré à l’acte – que l’on soit en libéral ou en centre de santé.
Les expérimentations forfaitaires (PEPS et IPEP*) associés à l'article 51 vont-elles dans le bon sens ?
Oui, sur le plan théorique ! Mais en pratique, des dissensus apparaissent déjà sur la manière de calculer ces forfaits. Doit-on se baser sur le nombre, le type ou les caractéristiques des patients ? Actuellement, on développe un modèle en fonction des données sur le paiement à l’acte puis on l’extrapole à des paiements forfaitaires… Nous voudrions fonder ces forfaits sur la qualité, la pertinence des soins et le travail d’équipe. Aujourd'hui, le ministère et l’Assurance-maladie ont toujours des difficultés à trouver un modèle financier structuré qui puisse nous correspondre.
* Paiement forfaitaire en équipe de professionnels de santé (PEPS) et Incitation à une prise en charge partagée (IPEP)
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