Des nouvelles applications santé pour les médecins ou pour les patients fleurissent très régulièrement sur les plateformes de téléchargement. Plus de 150 000 applications santé, le nombre a de quoi décourager -avant même de démarrer- les médecins qui voudraient s’intéresser à ce domaine et tester les applications pour eux-mêmes ou pour leurs patients. « Je pense qu’un confrère ne peut pas perdre son temps à tester 50 applications pour en trouver une qui soit pertinente », note le Dr Nicolas Lafferre qui a co-fondé l’application stagium et le label pour les applications et objets connectés mHealth Quality. Une démarche qui devrait faciliter la vie de bien des confrères. Car, si un généraliste a apriori l’expertise pour savoir si une application est utile au regard d’une pathologie ou de sa pratique, il n’a pas forcément la compétence pour s’assurer de la sécurité des données de santé ou de leur possible exploitation.
[[asset:image:11351 {"mode":"small","align":"left","field_asset_image_copyright":["DR"],"field_asset_image_description":[]}]]Être conseillé pour pouvoir conseiller
Pouvoir s’appuyer sur une recommandation, une labellisation pourrait en effet permettre à certains médecins d’être plus confiants vis-à-vis des applications santé. Dans le dernier baromètre CNOM-Vidal sur l’utilisation du smartphone par les médecins, 35% des sondés répondent ainsi qu’une labellisation pourrait les pousser à recommander davantage d’applications ou d’objets connectés. Pour réaliser cette labellisation les médecins feraient confiance en premier à une autorité de santé (79%) ou à une société savante (75%). Or pour l’instant, du côté de ces entités, on commence seulement à s’y mettre. La commission européenne proposera bientôt un référentiel de labellisation; même chose du côté de la HAS. Récemment, la Commission d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé (CNEDiMTS) de la HAS a aussi évalué pour la première fois une application santé « Diabéo » et émit un avis favorable en faveur de son remboursement. Mais jusqu’à présent les évaluations et labellisations provenaient essentiellement d’initiatives privées.
Avec dmdpost devenu aujourd’hui le label mHealth Quality, le généraliste Nicolas Lafferre et le psychiatre Guillaume Marchand ont tout de suite compris l’intérêt -face au foisonnement d’applications et d’objets connectés- d’une recommandation particulièrement par les pairs. L’idée est en quelque sorte de pouvoir apposer sur certaines applications le tampon « testé et approuvé » par vos confrères. Toutefois, dans l’évaluation d’une application, d’autres critères, indépendants de la pertinence et de la fiabilité médicale, rentrent en ligne de compte.
Medappcare est également une start-up, fondée par David Sainati docteur en pharmacie, qui propose une labellisation des applications. Il explique que quatre grandes thématiques sont considérées. Il faut d’abord regarder la conformité juridique et règlementaire, mais aussi la sécurité -celle des données mais aussi face aux virus- l’aspect scientifique et médical et enfin toute la dimension d’usage incluant ergonomie ou mise en page. Les professionnels de santé interviennent donc pour donner un retour d’un point de vue médical, mais aussi en tant que simple usager. Pour mHealth Quality ils peuvent s’inscrire pour être testeur en ligne, Medappcare travaille pour sa part avec les professionnels de santé de Medecin Direct, une plateforme de téléconsultation.
[[asset:image:11356 {"mode":"small","align":"right","field_asset_image_copyright":["DR"],"field_asset_image_description":[]}]]Tout cela peut-il convertir les confrères les plus méfiants ? Nicolas Lafferre considère que « le manque de partage d’expériences chez les médecins utilisant les applications avec succès » est l’un des principaux freins à l’utilisation ou la prescription des applications dans la profession. S’appuyer sur la « recommandation confraternelle » permet donc de créer les « conditions de la confiance pour l’utilisation et la recommandation des bonnes applications » et « guider vers les outils réellement utiles et ergonomiques, car cela ne s’évalue pas avec une seule personne et encore moins en demandant à l’éditeur son avis » estime le généraliste.
Les médecins qui testent les applications peuvent aussi varier certains de leurs critères, selon que l’application leur est destinée ou à leur patient. « En tant que médecin, je regarde la nature de l’éditeur : est-ce qu’il est connu, le nombre d’étoiles de son application, les autres qu’il a pu proposer. Je consulte aussi la date des dernières mises à jour, pour être sûr d’avoir des contenus valides. Le prix, tant qu’il est raisonnable, n’est pas un frein pour moi », souligne le Dr Laferre, surtout si l’outil lui permet de gagner du temps dans sa pratique. Pour les applications concernant les patients, « je les teste toujours avant », précise-t-il. Parfois, ce sont eux qui amènent le sujet mais « c’est une minorité » reconnaît-il. « Les nouvelles générations de patients, plus technophiles, vont à coup sûr me dépasser dans l’adoption de ces outils (…) La question est toujours celle de la validité des outils qu’ils utilisent ».
Pour ces entreprises privées qui ont pris les devants en matière d’évaluation d’applications, il est important en termes de crédibilité de montrer qu’elles proposent de véritables audits et ne tombent pas dans la délivrance payante à tout va de labels. « La moitié des applications que l’on évalue ne sont pas labellisées », explique ainsi David Sainati, « les éditeurs peuvent prendre en compte les suggestions d’amélioration et revenir vers nous. Dans cette deuxième phase, on en récupère encore 50% de labellisation ». « On ne vend pas un label, mais des audits pointus dans un éventail large de compétences. Nous ne sommes donc pas tentés de labelliser des applications à tout prix. C’est un travail d’éducation des éditeurs aussi », abonde Nicolas Lafferre.
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