Nouvelle étape vers l'eugénisme ou progrès scientifique important ? Les députés britanniques viennent d’autoriser une sorte de thérapie génique mitochondriale préimplantatoire faisant intervenir au final trois ADN différents pour un seul enfant. Au moment où les parlementaires se prononcent, cette question des "bébés à trois parents" divise profondément le Royaume-Uni, qui est le premier pays à franchir le pas.
Environ 125 bébés naissent chaque année en Grande-Bretagne avec un dysfonctionnement mitochondrial, transmis par la mère, avec à la clef, la survenue de maladies dégénératives graves telles que la myopathie.
Une technique, développée à Newcastle, permet de bloquer la transmission de la maladie de la mère à l'enfant. Elle consiste à retirer de l'ovule de la mère la mitochondrie défectueuse pour la remplacer par une mitochondrie saine provenant d'une autre femme qui reste anonyme. Après avoir été fécondé par le sperme du père en laboratoire, l'ovule est ensuite implanté dans l'utérus de la mère. Le futur enfant sera porteur de toutes les caractéristiques génétiques de son père et de sa mère puisque l'ADN mitochondrial représente moins d'un pour cent de la quantité totale d'ADN contenue dans une cellule humaine. Mais le changement touchant des cellules germinales, il sera permanent et se transmettra de génération en génération.
Pour les défenseurs de la technique, elle constitue une avancée majeure. Elle "offre aux familles la première lueur d'espoir d'avoir un bébé qui pourra vivre sans douleur ni souffrances", écrit un collectif d'associations internationales dans une lettre ouverte aux députés. Lord Robert Winston, l'un des pionniers de la fécondation in vitro, assure que la procédure est comparable à une simple prise de sang.
Les réserves de scientifiques, l’opposition des Eglises
Mais pour ses opposants, elle va trop loin en matière de modification génétique et ouvre la boîte de Pandore de la sélection des bébés. "Une fois cette frontière éthique franchie, une fois acté le fait qu'il est permis de manipuler le génome humain, il deviendra difficile de ne pas franchir les étapes suivantes pour aboutir à un monde de bébés fabriqués sur mesure, un scénario que tout le monde veut éviter", s'alarme David King de l'association Human Genetics Alert. Plusieurs experts mettent aussi en garde contre un procédé qui pourrait exposer les bébés conçus de cette manière à des risques plus importants de développer un cancer. Et regrettent le manque de recul sur une question aux enjeux aussi lourds. "Il faudra les surveiller toute leur vie, ainsi que leurs enfants. Nous ne connaissons pas encore l'interaction entre les mitochondries et l'ADN nucléaire. Dire que c'est comme changer une pile est trop simpliste, c'est beaucoup plus compliqué", souligne le Dr Trevor Stammers de l'Université St Mary de Twickenham, dans le Daily Telegraph.
Les Eglises catholique et anglicane d'Angleterre ont émis des réserves. L'opinion publique y est également en majorité défavorable. 41% des personnes interrogées par l'institut ComRes sont contre un changement de la loi sur l'embryologie et la fertilisation humaine, qui date de 2008, contre 20% se prononçant pour. Mais la Chambre des Communes vient d’entériner le processus et le passage devant la Chambre des Lords le 23 février ne devrait être qu’une simple formalité.
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