Les troubles de la déglutition s’expliquent en grande partie par un vieillissement accéléré des structures qui en sont responsables -musculaires, articulaires, ligamentaires, et neurocognitives- conduisant à une commande motrice plus lente et moins coordonnée. « Le diagnostic des troubles de la déglutition est encore trop souvent posé à l’occasion de complications : fausse route, encombrement pulmonaire à répétition, étouffement, perte de poids, poussées de fièvre dont on ne comprend pas la cause… Ils sont, pourtant, très fréquents : en institution, un résident sur deux a une dysphagie contre environ 10 % des personnes âgées vivant à domicile », souligne le Pr Hubert Blain
Certains symptômes typiques du sujet âgé peuvent évoquer des troubles de la déglutition : la toux, une voix modifiée, « mouillée » ou voilée, pendant ou après le repas, par exemple. Pour évaluer le risque de fausse route il convient de « dépister une insuffisance de mastication, un maintien en bouche insuffisant et, en faisant dire "aah-en-aah-en", une insuffisance de mobilité du voile du palais, nécessitant de modifier la texture alimentaire. La déglutition est analysée en posant le pouce sur l’articulation temporomandibulaire, l’index sur ses lèvres, le majeur sous son menton et l’annulaire au niveau de la pomme d’Adam d’un patient assis en position droite. Un patient qui ne ferme pas hermétiquement les lèvres, ne garde pas correctement l’aliment en bouche, n’a pas de mouvement en arrière de la langue pour propulser le bol alimentaire ou n’a pas de montée du larynx d’au moins 2 centimètres doit bénéficier d’un bilan orthophonique », explique le Pr Blain.
Le test à l’eau et avec des aliments mixés doit être effectué en présence du médecin de manière à connaître le type d’alimentation adéquat. Il consiste à donner prudemment et très progressivement des quantités croissantes d’aliments liquides, épaissis (eau gélifiée) puis mixés (cuillère à café, puis à soupe, puis une gorgée pour l’eau) en vérifiant, entre chaque test et à quatre reprises, que la déglutition est satisfaisante. « Ce test qui s’arrête dès l’absence de déglutition sécurisée permet de savoir si l’alimentation orale est possible, à la petite cuillère ou à la cuillère à soupe et si l’alimentation liquide ou avec de l’eau gélifiée est possible et par quelle méthode : cuillère ou gorgée », précise le Pr Blain.
Des causes souvent simples
Les causes les plus fréquentes de troubles de la déglutition sont souvent simples : candidose buccale à la suite d’une antibiothérapie, sécheresse buccale liée à la prise de certains médicaments (anticholinergiques, psychotropes…), prise de sédatifs. Les causes neurologiques peuvent également expliquer la dysphagie : maladie de Parkinson, maladie d’Alzheimer, accident vasculaire cérébral. Outre l’avis orthophonique, et en l’absence de cause précise, un avis ORL, neurologique ou gastro-entérologique peut être utile. À chaque cause identifiée correspond un traitement spécifique.
Quoi qu’il en soit, pour réduire le risque de fausse route, les aidants familiaux et professionnels doivent connaître quelques règles simples. « Les personnes âgées ont souvent du mal à savoir où se trouve le bol alimentaire par rapport à leur langue. Il faut donc éviter de leur donner des aliments tièdes, sans goût, difficiles à déglutir, fibreux, collants ou granuleux. Et privilégier les aliments chauds ou froids, salés, amers, sucrés et les eaux pétillantes. Par ailleurs, il ne faut jamais que la personne mange la tête en arrière ou qu’elle parle pendant le repas. Il est utile de bien appuyer sur la langue avec la cuillère pour favoriser le réflexe archaïque de déglutition. Enfin, les aidants doivent, penser à fractionner les repas et vérifier, après chaque bouchée, que le bol alimentaire a bien été avalé », conclut le Pr Blain.
D’après un entretien avec le Pr Hubert Blain, CHU de Montpellier
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