LE QUOTIDIEN : Quel est l’objet de cette étude réalisée au CHU de Toulouse ?
Dr ANTOINE ROUGET : Nous avons lancé cette étude l’année dernière au moment de la première vague, en collaboration avec l’Institut des maladies métaboliques et cardiovasculaires à Toulouse. Nous souhaitions mesurer la prévalence de la dénutrition chez les patients hospitalisés pour Covid.
Quelle a été votre méthodologie ?
Pendant près de deux mois, nous avons inclus 80 patients, hommes et femmes de tous âges qui étaient hospitalisés pour pneumonie grave à SARS-CoV-2, dont certains en réanimation. Dans la cohorte se trouvaient aussi des patients hospitalisés pour Covid dans les services de chirurgie cardiaque, néphrologie et gastroentérologie, et qui étaient susceptibles de basculer en réanimation.
Parmi l’échantillon, nombre de patients étaient en surpoids ou obèses, il n’était donc pas évident de mesurer d’emblée leur dénutrition. Pour le faire, la pesée était systématique lors de l'entrée à l’hôpital et nous avons utilisé la méthode diagnostique clinique validée par un groupe d’experts internationaux : le Global Leadership Initiative on Malnutrition (GLIM). Cette méthode consiste à évaluer l’indice de masse corporelle (IMC), la perte de poids récente (5 % en un mois), la diminution des apports alimentaires et une infection inflammatoire aiguë.
Qu’avez-vous observé ?
Nous avons observé que 37,5 % des 80 patients présentaient une dénutrition dès leur entrée à l’hôpital et chez ces patients dénutris, la perte de poids avait atteint 5 % en seulement sept jours entre l’apparition des symptômes Covid et l’hospitalisation. Le phénomène était donc très rapide et élevé.
Par ailleurs, 46,2 % des patients dénutris avaient réduit de plus de la moitié leur apport alimentaire sur cette même période avant leur hospitalisation, sans doute en raison des symptômes associés au Covid : 27, 8 % ont en effet évoqué une perte du goût ou d’appétit, 21,5 % une fatigue et 20,3 % une perte d’odorat.
Quelles sont vos conclusions concernant l’impact du virus sur l’état nutritionnel ?
Nous n'avons pas mis en évidence l'impact de la diminution des apports alimentaires sur la dénutrition puisque seul un malade sur deux ne mangeait plus à la maison avant l’hospitalisation. Cet élément ne peut donc être le seul qui justifie la perte de poids ; en revanche, nous pensons que la réaction inflammatoire très importante provoquée par le virus en est responsable.
Autre enseignement de l’étude, les patients dénutris n’ont pas eu plus souvent recours à la réanimation. D’ailleurs, les résultats ne nous permettent pas de dire que la dénutrition est responsable de la surmortalité parmi cet échantillon.
Comment ces résultats ont-ils modifié la prise en charge des patients Covid au CHU ?
Cette prévalence de la dénutrition confirme la nécessité d’une prise en charge nutritionnelle adaptée et spécifique aux patients Covid. Depuis, nous systématisons la recherche de perte de poids récente dès l’entrée à l’hôpital et proposons une alimentation enrichie.
*A. Rouget et al., British journal of Nutrition, décembre 2020. doi.org/10.1017/S0007114520005127
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