Quel que soit l'âge, l'automédication n'est pas un comportement anodin. Mais c'est particulièrement le cas chez le sujet âgé, en raison des nombreux facteurs de risque propres à cette classe d’âge. Les sujets âgés sont plus sensibles aux effets indésirables des médicaments dont les conséquences peuvent être graves.
Or on constate une polymédication des personnes âgées qui prennent en moyenne 4 à 5 médicaments par jour en raison de leur polypathologie (8 à 10 chez les plus de 85 ans), mais aussi en raison des prescriptions de nombreux spécialistes qui s’ignorent parfois (ophtalmologistes, cardiologues…).
Le risque d’iatrogénie médicamenteuse est dès lors augmenté, d’autant que se surajoutent des modifications du métabolisme, une insuffisance rénale, une dénutrition, des troubles locomoteurs, un déficit sensoriel et des troubles cognitifs, sources d’accidents par erreur, par confusion (notamment en cas de médicaments génériques) ou par oubli des prises médicamenteuses. En ajoutant des médicaments d’autoprescription, le risque d’interactions ou de surdosage est donc encore plus élevé.
L’iatrogénie médicamenteuse a un coût humain et économique très élevé chez le sujet âgé. Elle serait responsable de plus de 20 % des hospitalisations chez les patients de plus de 80 ans. Et une grande partie de cette iatrogénie pourrait cependant être évitée.
Une consommation qui échappe au médecin
L’automédication concerne surtout les laxatifs, les médicaments anti-acides ou anti-reflux, les antalgiques et AINS, les antitussifs, les somnifères, les anti-infectieux locaux…pour soulager les symptômes communs les plus fréquents.
« Les patients peuvent demander conseil au pharmacien, mais ils peuvent aussi se servir eux-mêmes, bon nombre de médicaments (environ 300) se trouvant en libre-service. De plus, l’armoire à pharmacie des patients est bien généralement bien garnie car souvent il reste des boîtes non finies qu’ils reprennent pour des symptômes similaires… » souligne le Dr Amina Lahlou (Hôpital Charles Foix)
Cette consommation « échappe » souvent au contrôle des médecins sauf s’il s’agit de prescriptions ponctuelles en cas d’herpès, de migraine par exemple. Les patients oublient de dire ce qu’ils prennent par habitude pour des symptômes courants. Surtout qu’il n’y a pas que les médicaments. Il faut aussi penser à la phytothérapie (millepertuis…), aux compléments alimentaires, aux vitamines, aux huiles essentielles…qui ne sont pas sans risque d’interaction médicamenteuse.
Il faut s’alerter devant tout symptôme inhabituel ou inexpliqué (troubles de l’équilibre, vertiges, chute, confusion, fatigue, perte d’appétit, troubles du transit…). « L’automédication doit être systématiquement recherchée et le patient être informé des risques auxquels il s’expose. Il est nécessaire de la prendre en considération lors de toute nouvelle prescription », ajoute le Dr Amina Lahlou. Le rôle du médecin généraliste en matière de prévention, d’information et d’accompagnement à l’automédication est primordial. De nombreux autres professionnels de santé intervenant auprès des personnes âgées (médecins, pharmaciens, infirmières, kinésithérapeutes…) peuvent également intervenir et être vigilants.
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