« CETTE ÉTUDE marque un tournant dans la recherche sur l’autisme et constitue une étape fondamentale pour comprendre comment traiter l’autisme », explique au « Quotidien » Jeremy Willsey, qui a mené l’une des études sous la direction du Pr Matthew State (Université de Yale a New Haven et université de San Francisco). L’autisme et les TSA, caractérisés par des déficits des interactions sociales, des problèmes de communication et des troubles du comportement, ont une origine multifactorielle avec une forte composante génétique hétérogène.
Des centaines de gènes mutés ont été associées aux TSA, mais comment ces mutations causent-elles l’autisme ? Pour répondre à cette question, deux équipes ont exploité l’atlas digital BrainSpan de l’Institut Allen, une base de données publique constituée par un consortium de chercheurs et qui recense et caractérise l’expression des gènes dans les différentes régions du cerveau à différents âges (sur la base de 57 cerveaux post-mortem). Willsey et coll. se sont concentrés sur 9 gènes les plus fortement associés aux TSA (avec des mutations perte de fonction de novo). Ils ont découvert qu’ils sont co-activés surtout dans les neurones corticaux à projections glutamatergiques (excitatrices), dans le cortex préfrontal (couches 5 et 6), durant une période allant de 2 mois et demi à 6 mois après la conception.
Leur prochain objectif sera d’examiner précisément ces gènes au cours de cette période, dans cette région cérébrale, et dans ce type cellulaire, afin de comprendre ce qui est spécifiquement perturbé.
« Étant donné le petit sous-groupe de gènes que nous avons étudié, je ne m’attendais pas à observer ce degré de convergence spatiotemporelle », souligne le Pr State. « Ceci suggère fortement que même s’il existe des centaines de gènes à risque pour l’autisme, les mécanismes biologiques sous-jacents seront beaucoup moins nombreux. C’est un indice très important pour avancer vers le développement de thérapies personnalisées et ciblées dans cette maladie », poursuit-il. Il précise aussi : « Nous n’aurions pas pu accomplir ceci, il y a deux ans car nous n’avions pas les ingrédients clés, c’est-à-dire un ensemble non biaisé de gènes de l’autisme et une carte du paysage du cerveau humain en développement. »
Un mauvais câblage.
L’approche de l’équipe de l’Université de Los Angeles est différente. Parikshak et coll. ont d’abord examiné l’expression des gènes dans les cerveaux normaux entre 2 mois après la conception jusqu’à l’age d’un an, puis ont cartographié sur ces réseaux des centaines de gènes provenant de multiples séries de patients TSA, ainsi que de patients ayant un déficit intellectuel (QI bas).
De façon frappante, les gènes liés aux TSA sont surtout activés dans les couches corticales superficielles et les neurones à projections glutamatergiques (inter et intra hémisphériques) durant des moments précis du développement, par contraste avec les gènes liés au déficit intellectuel qui ne montrent pas de réelle spécificité développementale ou anatomique, ce qui constitue une nouvelle preuve que les 2 affections sont bien distinctes.
« Les variants géniques liés aux TSA sont exprimés dans le cerveau en développement lorsque les cellules définissent leurs identités et leurs rôles futurs dans les circuits neuronaux. Par conséquent, ils influencent le câblage du cerveau en altérant les synapses et en façonnant comment les neurones se transmettent les signaux », explique Neelroop Parikshak qui a mené ce travail sous la direction du Pr Geschwind.
« Nous avons découvert une perturbation des circuits qui relient les couches du cerveau et les hémisphères cérébraux entre eux ; nos résultats suggèrent que les gènes mutés sont à l’origine de ce mauvais câblage. Notre analyse est disponible pour permettre a d’autres chercheurs d’aller plus loin », précise le Pr Geschwind. « Nous pensons que c’est un pas important pour comprendre les mécanismes biologiques qui sous-tendent l’autisme et d’autres troubles du neurodéveloppement ».
Ces résultats, selon les chercheurs, expliqueraient pourquoi les programmes d’intervention précoce dès l’âge de 1 an, peuvent aider les enfants autistes. Puisque leurs cerveaux sont encore en développement, ils pourraient plus facilement corriger ou compenser pour certaines de ces mauvaises connexions.
Cell, 21 novembre 2013, Parikshak et coll., Willsey et coll.
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