PENSÉE à la fois comme un nouvel outil de diagnostic et de recherche, la consultation génétique est devenue une réalité depuis le début de l’année 2012 au sein du CHR d’Orléans. « Ayant la chance d’être chef de service de génétique et responsable d’une équipe au CNRS de recherche sur l’autisme et les déficiences mentales depuis 1997, nous avons imaginé une structure complètement transversale qui va du patient à la cellule et de la cellule au patient », raconte le Dr Sylvain Briault. À ce jour, entre 50 et 60 nouveaux patients peuvent chaque année bénéficier de ce type de consultation encore inédite en France. « Comme on n’a qu’un temps plein sur ce projet, cela limite l’offre, d’autant plus que cette consultation prend à chaque fois deux à trois heures », poursuit le Dr Briault. Celle-ci s’organise en deux temps : « On voit déjà les parents seuls, sans l’enfant ou l’adolescent car c’est beaucoup plus approprié et calme pour mener l’enquête familiale. Ensuite on programme l’examen clinique du patient, ce qui prend encore deux à trois heures selon les cas. Après il faut programmer les analyses, analyser les résultats, faire les courriers… », détaille le chef de service structure interne de génétique du CHR d’Orléans.
Voie prometteuse.
Pour Sylvain Briault, l’étude des populations de personnes souffrant d’autisme et la description des gènes mutés a permis d’accumuler au fil du temps des « arguments convaincants » en faveur de « l’existence de facteurs génétiques » qui justifient une telle consultation. Le chercheur décrit tout d’abord les récurrences des cas d’autisme : « On sait que lorsqu’une famille a un premier enfant autiste, le risque pour cette famille de voir réapparaître un deuxième cas lors d’une nouvelle grossesse est cinq fois supérieur par rapport à celui de la population générale. » Le sexe ratio, avec une surreprésentation masculine soutient également « l’hypothèse d’une mutation sur le chromosome X ». En effet, « chez la fille, l’autre X peut pallier à cette anomalie », rappelle le Dr Briault. Un autre argument relève de l’observation des jumeaux. Chez les faux jumeaux, la concordance d’atteinte est de l’ordre de 5 % contre 90 % chez les vrais jumeaux. « Cet élément est extrêmement important puisqu’il montre bien que le facteur génétique va être prépondérant », souligne le chercheur. Enfin, et c’est selon lui l’argument majeur en faveur du facteur génétique, dans 4 à 7 % des cas d’autisme, des « points chauds de remaniement chromosomique » impliquant un ou plusieurs gènes et à l’origine de ces différents troubles du développement.
Thérapies ciblées.
« Le premier intérêt de cette démarche, c’est de différencier les autismes purs des pathologies génétiques avérées ayant la symptomatologie du spectre autistique comme le syndrome de l’X fragile », indique le PH., Avec les outils et connaissances actuelles « nous ne répondons pas à 100 % des demandes. Nous retrouvons une cause génétique de l’autisme dans 20 % des cas. Cela peut paraître peu, mais en génétique c’est déjà beaucoup. Il faut savoir que lorsque l’on fait un caryotype à un sujet atteint de déficience mentale, on aboutit à un diagnostic dans 12 % des cas dont la moitié sont des trisomies 21. Sur le retard mental pur, on a 6 % de capacité de diagnostic », précise-t-il. L’intérêt de la consultation génétique devrait prendre encore plus de poids en perspective des progrès attendus en termes de prise en charge de l’autisme. « Il existe actuellement, plusieurs essais cliniques qui sont en cours dans des pathologies de type autistique comme l’essai sur les anomalies du gène SHANK 3 aux États-Unis. Des pistes de thérapies ciblées pour certains types d’autisme vont émerger d’ici 4 à 6 ans. Et bien sûr, pour traiter les sujets qui ont une anomalie de cette cible, il serait tout à fait important d’identifier au préalable ce type d’anomalie », estime Sylvain Briault.
Réseau de soins.
Au CHR d’Orléans, l’organisation de la consultation génétique a été spécialement conçue pour le patient autiste. L’accueil est tout d’abord adapté : « Nous ne demandons pas aux familles d’aller faire la queue pendant une heure pour avoir le bon de consultation. Nous le faisons pour eux la veille et de cette façon, le sujet autiste n’a pas à côtoyer le bruit des personnes de la salle d’attente ». Autres détails qui ont leur importance : face à l’autiste, le médecin ne porte jamais sa blouse et lorsqu’un lien de confiance est installé, il va jusqu’à l’accompagner au centre de prélèvement pour éviter les « ruptures ». Dans la même optique, cette consultation a généré la création d’un réseau de soins et d’accompagnements complémentaires - assistance sociale, dentiste, stomatologie, gynécologie - ce qui permet « d’ouvrir les portes » à une palette de soins qui demeure encore très difficile d’accès pour les personnes autistes.
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