Maladies inflammatoires chroniques de l’intestin

Bientôt le casse-tête des séquences thérapeutiques ?

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Publié le 28/11/2019
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Depuis leur arrivée au début des années 2000, les biothérapies ont révolutionné la prise en charge de la maladie de Crohn (MC) et de la rectocolite hémorragique (RCH). Les anti-TNF alpha (infliximab, adalimumab), puis les anti-IL12/23 (anti-intégrine α4β7) et très récemment le premier anti-JAK (tofacitinib dans la RCH), ont enrichi l’arsenal thérapeutique et permis le contrôle des formes résistantes. L’heure est désormais à l’individualisation des traitements. Mais pour quelle séquence de prescription opter ?
Les préférences du patient, son profil d’adhérence et de tolérance au traitement doivent également être pris en considération.

Les préférences du patient, son profil d’adhérence et de tolérance au traitement doivent également être pris en considération.
Crédit photo : Phanie

Premier essai en face-à-face avec des médicaments biologiques, l’essai de phase 3b VARSITY, points forts de l’édition 2019 de l’UEGW, compare le vedolizumab (anti-intégrine α4β7) à l’adalimumab dans la RCH, modérée à sévère. « Les résultats sont en faveur du vedolizumab, indique le Pr David Laharie, pour la réponse clinique précoce et la rémission durable, avec notamment un gain global de 9 % en termes de rémission à un an ». Une seconde étude dans la RCH, rétrospective, a comparé deux biologiques intraveineux : le vedolizumab versus l’infliximab après échec d’un anti-TNF. L’avantage va à l’anti-intégrine, vis-à-vis de la rémission clinique et les évènements en rapport avec la maladie (interruption de traitement, colectomie, évènement aigu, hospitalisations). Mais pour faire bouger les lignes en France où le vedolizumab n’est indiqué et remboursé qu’en seconde ligne, après échec ou intolérance d’un anti-TNF, il faudra confirmer ces résultats. Des études sont d’ailleurs en cours.

Mais la rémission n’est pas le seul paramètre à entrer en ligne de compte. Les préférences du patient (vedolizumab en intraveineuse à l’hôpital ou adalimumab en sous-cutané au domicile), son profil d’adhérence et de tolérance au traitement doivent également être pris en considération.

Une décision thérapeutique qui se complexifie

Des essais de phase 2 ont montré, dans la MC, une amélioration précoce des symptômes et de l’activité clinique de la maladie sous risankizumab (inhibiteur IL-23p19), et une amélioration clinique et endoscopique sous mirikizumab (anticorps anti IL-23p19). Les résultats de phase 2b de l’anti-JAK 1 upadacitinib, dans la RCH, semblent prometteurs chez les patients réfractaires avec une maladie modérée à sévère.

La conduite d’essais en face-à-face, mais également l’afflux de nouvelles molécules en développement, en phase 2 et 3, laissent imaginer que « d’ici à 5 ans, nous disposerons non plus de 5 ou 6 médicaments comme actuellement, mais plutôt 10 voire 15, ce qui complexifiera d’autant les décisions thérapeutiques, avertit David Laharie. Le médecin devra prendre en compte les effets indésirables, le coût, mais aussi des critères de choix individuels, s’appuyant à la fois sur des paramètres objectifs (âge, commodités, stade de la maladie, etc.) mais également subjectifs, liés au ressenti et à l’avis du patient. À ce choix épineux s’ajoute la difficulté d’appliquer les résultats des essais cliniques sachant qu’en moyenne seuls 25 % des malades inclus dans les protocoles correspondent aux patients vus en routine ». Enfin, pour corser l’affaire, les perspectives d’associations de molécules d’actions distinctes se dessinent, chez les patients en échec.

Hélène Joubert

Source : Le Quotidien du médecin