L’examen somatique doit être méticuleux et relever la topographie des lésions. Il faut également rechercher une association à des dysesthésies, des facteurs déclenchants ou aggravants, d’éventuelles circonstances apaisantes, apprécier l’évolution, la chronologie dans la journée et dans l’année, enfin évaluer le contexte associé : maladie, prise médicamenteuse, exposition à un toxique. Les prurits d’origine dermatologiques sont très nombreux et certains concernent un peu plus la personne âgée : urticaire, pemphigoïde, lichen plan, gale...
"Est-il utile de pratiquer une immunofluorescence en peau saine chez la personne âgée qui présente un prurit sine materia, questionne le Pr Laurent Misery ? La réponse est oui si on en juge les résultats d’une récente étude qui montrent que des anticorps sont parfois retrouvés dans ce contexte et qu’ il y a alors souvent une évolution vers la pemphigoïde (1)".
Le prurit peut être d’origine non dermatologique lié à une insuffisance rénale chronique, une cholestase, une hémopathie, des troubles endocriniens et métaboliques (carence en fer, dysthyroïdie, diabète), un cancer, une neuropathie. Il peut être psychogène chez des personnes âgées isolées, dépressives. Il peut être aquagénique ou encore d’origine médicamenteuse. De nombreux médicaments ont été incriminés à tort ou à raison : les bêtalactamines, les analgésiques et les anti-inflammatoires, les traitements hormonaux, les antidiabétiques, les statines, les bêtabloqueurs, les IEC, les psychotropes, les anticoagulants, les diurétiques, les vitamines...
Ne pas confondre idiopathique et psychique.
Parfois la cause fait défaut. La tendance alors est de céder à la facilité et de déclarer le prurit "psychogène". Erreur ! En effet, le prurit psychogène a ses critères définis par le Groupe psychodermatologie de la Société française de dermatologie. Pour être qualifié ainsi, il faut qu’il réponde obligatoirement à 3 critères : sine materia (sans lésions cutanées spécifiques), chronique (› 6 semaines), sans cause somatique. Trois autres critères sont optionnels parmi les suivants : il existe une relation chronologique entre la survenue du prurit et un événement de vie pouvant avoir un retentissement psychologique, le prurit varie en intensité avec le stress, il varie avec le nycthémère, il prédomine pendant les périodes de repos ou d’inactivité, il est associé à un trouble psychique, il est amélioré par des psychotropes ou par une psychothérapie.
Plusieurs causes sont évoquées pour expliquer le prurit sénile. Aucune n’est satisfaisante. Certains impliquent la xérose, d’autres une hypersensibilité à l’histamine. Actuellement, la désafférentation c’est-à-dire la diminution des terminaisons nerveuses intraépidermiques, est fréquemment incriminée.
Quoi qu’il en soit le traitement est difficile. Les conseils sont utiles : couper les ongles courts, éviter les douches et préférer les bains, éviter la chaleur et les irritants, préférer le coton à la laine… Les émollients sont très utiles (cosmétiques contenant des antiprurigineux). Les antihistaminiques n’ont aucun intérêt en dehors de l’effet placebo mais ne sont pas dénués d’effets secondaires en particulier chez les personnes âgées. Les anxiolytiques auraient leur place mais ont également des effets secondaires et sont contre-indiqués en présence de glaucome et de rétention urinaire. Les antidépresseurs ont une meilleure tolérance.
D’après la communication du Pr Laurent Misery, CHU de Brest
(1) Schmidt T. et al Br J Dermatol. 2 014 ; 171 (2) : 212-9.
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