La douleur chronique post-chirurgicale est la deuxième cause de douleur neuropathique après la lombosciatique. En effet, la cause de la douleur chronique est la chirurgie chez 20 % des patients consultant dans un centre antidouleur.
Elle se définit par une douleur du site opératoire sans lien avec une complication postopératoire ni lien avec la constatation d’une douleur pré-opératoire, et qui persiste plus de 2 mois après l’acte chirurgical, contre 3 mois dans la définition classique d’une douleur chronique.
Les revues générales évoquent une incidence globale de 30 % mais celle-ci est fondée sur des données obtenues le plus souvent par interrogatoire des patients, sans possibilités de les examiner ou les interroger précisément. Cette incidence porte sur les douleurs quels que soient leur intensité, leur type, leurs caractéristiques et enfin leur perception par le patient. L’incidence ainsi considérée constitue donc une estimation globale très large de la douleur chronique post-chirurgicale.
D’un point de vue individuel, l’incidence n’a pas la même valeur pour une chirurgie indispensable comme une chirurgie tumorale, et pour une chirurgie fonctionnelle ou esthétique. Le contexte chirurgical de la douleur participe en effet à la définition de l’incidence acceptable pour un patient dans une situation donnée. Du point de vue de la santé publique, en revanche, l’impact d’une incidence même faible est important si l’acte chirurgical est très fréquent.
Vers une nouvelle définition
Par ailleurs, des évaluations répétées montrent que la prévalence de la douleur chronique diminue avec le temps, plus de 55 % des patients douloureux à 6 mois étant asymptomatiques à 12 mois dans une étude réalisée en France (1). Mais inversement, environ 3 % des patients indemnes de toute douleur à 6 mois étaient douloureux à 12 mois.
Enfin, les douleurs pré-opératoires au site de l’acte chirurgical sont fréquentes en cas de douleur postopératoire, de l’ordre de 6 fois sur 10, et elles constituent souvent une indication chirurgicale. Mais les douleurs pré- et postopératoires sont souvent aisément différenciables.
Un point essentiel est la perception de la douleur par le patient. Dans une étude de type cohorte réalisée en Norvège, 40 % des patients ont déclaré une douleur post-chirurgicale, 18 % parlant de douleur modérée à sévère. Mais, lorsqu’ils étaient interrogés sans référence précise à la chirurgie, seulement 51 % des patients atteints de douleur chronique post-chirurgicale ont rapporté une douleur chronique (2).
Au total, une nouvelle définition de la douleur chronique post-chirurgicale semble devoir être envisagée (3). Elle devrait tenir compte de l’existence d’une douleur pré-opératoire, être définie par une durée de 3 à 6 mois au moins, et affecter la qualité de vie. Sa chronologie et sa topographie devraient également être prises en compte, en précisant par exemple s’il s’agit de la continuation d’une douleur postopératoire aiguë ou si la douleur chronique s’est développée à la suite d’une période asymptomatique.
Si une définition ad hoc est adoptée, que son évaluation ne porte que sur les douleurs modérées à sévères, et qu’un suivi suffisamment prolongé est effectué, alors, l’incidence « vraie » de la douleur chronique post-chirurgicale est de l’ordre de 15 %.
(1) Fletcher D, et al. Chronic postsurgical pain in Europe: An observational study. EurJ Anaesthesiol 2015;32(10):725-34
(2) Johansen A, et al. Persistent postsurgical pain in a general population: prevalenceand predictors in the Tromso study. Pain 2012;153(7):1390-6
(3) Werner MU, Kongsgaard UE. I. Defining persistent post-surgical pain: is an update required? Br J Anaesth 2014;113(1):1-4
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