CERTES, LE TABAC reste loin devant. Alors que le tabagisme multiplie par plus de 23 le risque de cancer du poumon pour les hommes et par plus de 12 pour les femmes, la pollution aux particules en suspension n’est pas anodine. Selon l’étude européenne ESCAPE (European Study of Cohorts for Air Pollution Effets), la pollution de l’air augmente le risque de cancer du poumon de 22 % tous les 10 microgrammes/m3 de particules de matière (PM), tous types de cancers confondus. Ces résultats obtenus à partir de 17 cohortes totalisant plus de 312 340 sujets suivis 12,8 ans en médiane, ont de quoi sérieusement inquiéter, puisque le phénomène touche l’ensemble de la population. Alors que les polluants de l’air sont essentiellement liés au trafic et à la densité de construction, le risque de cancer du poumon augmente de 9 % pour chaque palier de 4 000 kms parcourus par des véhicules dans les 100 mètres du lieu de résidence.
Si la France n’est pas au tableau des inscrits d’ESCAPE, celui-ci comptait du Nord au Sud, la Norvège, la Suède, le Danemark, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, l’Autriche, l’Italie, l’Espagne et la Grèce. Le niveau de pollution était très divers avec des concentrations 3 à 12 fois plus élevées dans certaines régions du sud par rapport à celles du nord. Le risque d’adénocarcinome, ce type histologique étant un bon indicateur du fait de sa fréquence plus élevée chez les non-fumeurs, était augmenté de plus de 50 % tous les 5 microgrammes/m3 en PM. A contrario, les cancers épidermoïdes n’étaient pas associés à la pollution par les PM.
Les particules fines et moins fines
La pollution de l’air ne se résume pas aux particules en suspension, mais ce sont les seuls polluants associés au risque de cancer du poumon. L’effet du monoxyde d’azote et de la suie s’est avéré non significatif. Tous les polluants ont été mesurés à des saisons différentes. Quant aux PM, l’étude ESCAPE a étudié leur effet selon leur diamètre, les particules de moins de 10 micromètres (PM10), celles de moins de 2,5 micromètres (PM2,5) dites « particules fines » et celles comprises entre 2,5 et 10 micromètres. L’augmentation du risque de cancer du poumon était la même pour les PM10 et les PM2,5. Deux indicateurs du trafic ont été utilisés, à savoir le trafic total dans les 100 mètres du lieu de résidence (nombre de kms parcourus par des véhicules/jour) et l’intensité du trafic (nombre de véhicules/jour) dans la rue la plus proche.
Écologie et santé publique font bon ménage
L’étude ESCAPE confirme les études précédentes sur l’association entre pollution de l’air et cancer du poumon, en s’affranchissant des limites de ces dernières, grâce à une population plus importante, une couverture européenne plus étendue et de nombreux ajustements, tels que le tabagisme renseigné dans toutes les cohortes, le taux de radioactivité naturelle ou encore le degré d’urbanisation. Les résultats de l’étude suggèrent par ailleurs que le risque de cancer du poumon existerait pour des concentrations en PM inférieures aux normes européennes existantes sur la qualité de l’air, qui définissent la limite du seuil pour les PM10 à 40 microgrammes/m3 et celle pour les PM2,5 à 25 microgrammes/m3.
Si ces dernières observations méritent d’être contrôlées, le fait que l’association entre cancer du poumon et pollution de l’air reste globalement linéaire suggère clairement que « toute réduction des concentrations en particules fines, que ce soit en-dessous ou au-dessus des taux actuels, pourra se traduire par des bénéfices en santé publique », comme l’a résumé l’OMS dans un rapport récent de 2013. À ce sujet, des interventions comme la réduction du taux de soufre des carburants et la régulation du trafic se sont déjà avéré bénéfiques. Et comme le concluent dans un éditorial deux professeurs japonais en écologie humaine, si la pollution est un facteur de risque de cancer du poumon, «comme le tabac, il s’agit de facteurs contrôlables».
The Lancet Oncology, publié en ligne le 10 juillet 2013
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