L'Ordre national des médecins a trop peu sanctionné les violences sexistes et sexuelles de médecins, reconnaît son président, le Dr François Arnault, dans une interview mercredi au quotidien Ouest-France. « Il y a des radiations, des sanctions, des interdictions d’exercice », indique le président de l'Ordre. Mais « les chiffres sont insuffisants, c’est indiscutable. Nous ne faisons pas tout bien. Dans le contexte général de prise de conscience, l’Ordre a un rôle essentiel à jouer pour moraliser et normaliser la profession médicale ».
Le témoignage de l'infectiologue Karine Lacombe, qui accuse le médiatique urgentiste Patrick Pelloux de « harcèlement sexuel et moral », a déclenché ces dernières semaines une vague de témoignages sur les réseaux sociaux, notamment sous le mot-dièse #MeTooHopital.
Metoomédecine : étudiants et syndicats devant le ministère
Ces déclarations ordinales en forme d’autocritique au sujet des violences sexistes et sexuelles interviennent alors qu’un rassemblement est justement prévu ce mercredi à partir de 18 h devant le ministère de la Santé à Paris. Les manifestants – à l'appel d’étudiants en médecine, de syndicats et d’associations féministes comme Osez le Féminisme ! ou Le Collectif national pour les droits des femmes … – souhaitaient être reçus par les ministres Catherine Vautrin et Frédéric Valletoux.
« Le monde de la santé, loin d’être épargné par les violences sexistes et sexuelles, en est au contraire un terreau particulièrement fertile », écrit dans cet appel le collectif Emma Auclert, qui réunit des étudiants en médecine, à l'origine de l'initiative. « La culture du viol et l’omerta sont nourries par les fortes hiérarchies professionnelles, le management pathogène, l’esprit de corps et la “culture carabine" », peut-on lire. Parmi les autres organisations signataires figurent Nous Toutes, l'Union syndicale Solidaires, Union étudiante, STOP aux violences obstétricales et gynécologiques ou encore l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles dans l’enseignement supérieur.
Retrait effectif des fresques pornos
Tous demandent « en urgence » la mise en place d’un « plan ambitieux de prévention et de sensibilisation aux violences sexistes et sexuelles dans les universités et les établissements de santé publics comme privés, avec notamment des formations obligatoires ». Ils souhaitent aussi le retrait effectif « de toutes les fresques pornographiques encore présentes dans certains hôpitaux malgré leur interdiction » et la création d’une plateforme de signalement anonyme pour les patients. Autre requête, « la protection effective » pour tous les étudiants et professionnels signalant des violences sexistes et sexuelles.
« Ce qui était accepté par tout le système hospitalier comme étant dans la nature des choses apparaît maintenant comme un état de fait et de pensée qui est tout à fait inacceptable, insiste le Dr Arnault. Je me réjouis de cette prise de conscience parce qu’elle est indispensable ». À la demande de son président, l'Ordre national des médecins va procéder à une enquête professionnelle auprès du corps médical sur les violences subies ou constatées. Les résultats seront connus au mois d'octobre, précise-t-il.
Une très vive polémique agite par ailleurs depuis plusieurs mois la faculté de médecine de Limoges, au sujet d'un étudiant en médecine venu y continuer ses études après avoir été condamné pour agressions sexuelles.
Dans une lettre ouverte publiée mardi, le syndicat d’internes de médecine générale (Isnar-IMG) et une trentaine d'associations et de syndicats cosignataires demandent que l'étudiant mis en cause aille en urgence en conseil de discipline avant qu'il puisse « passer ses examens et continuer ses stages et par conséquent sa carrière de soignant ».
« Le matin, je me demandais si j’allais bosser ou si je fonçais dans un mur », une médecin partage ce qui l’a aidée à sortir du burn-out
Pédocriminalité : l'ex-chirurgien Joël Le Scouarnec renvoyé devant une cour criminelle
Vieillir avec le VIH : un suivi associatif pour les femmes migrantes à Lyon
Fin de vie : députés et associations veulent reprendre les discussions, le gouvernement silencieux