Des professionnels libéraux impliqués dans la constitution de CPTS ont témoigné de leur motivation mais aussi de leurs interrogations et difficultés, lors de la première journée régionale des CPTS organisée par les URPS des Hauts-de-France, le 7 novembre à Lille.
Ils sont médecins, infirmiers, pharmaciennes, sage-femme ou orthophoniste et les projets de CPTS dans lesquels ils sont engagés sont plus ou moins avancés (en émergence, phase d'écriture ou de finalisation). Tous en espèrent une amélioration de la prise en charge des patients ainsi que de leur qualité d'exercice. Une meilleure communication territoriale est aussi espérée. « Le lien s'est perdu », regrette le Dr Franck Garate, co-porteur d'un projet de CPTS à Amiens. « La CPTS va créer une dynamique », ajoute-t-il. Pour Saliha Grévin, pharmacienne à Douai, la CPTS permettra aux libéraux d'« exister face aux GHT ». Et face aux prestataires de santé ! ajoute Marie-Odile Guillon, infirmière à Compiègne.
Ne pas avoir peur
Parmi les porteurs de projets, plusieurs sont élus à l'Ordre ou à l'URPS de leur profession – voire aux deux – d'autres déjà impliqués dans une maison de santé et donc potentiellement plus au fait de ces nouveaux groupements libéraux. À l’inverse, nombre de professionnels ignorent encore tout de cette réorganisation territoriale ou confondent les sigles. Pour Sophie Houppermans, pharmacienne, « il faut passer beaucoup de temps pour expliquer ce qu'est une CPTS ». Des efforts bénévoles car le financement n'arrive que lorsque la communauté commence à fonctionner.
Les médecins ne sont pas toujours les plus motivés. « Peut-être ont-ils peur, se désole le Dr Vincent Couvreur, généraliste dans le Haut-Escaut. Il n'y a pourtant pas à avoir peur. C'est l'avenir de se coordonner pour améliorer l'efficience des soins. » Ainsi, peu de généralistes participent au montage de la CPTS du Grand-Douai, regrette Karine Decreton, sage-femme. « Certains, plutôt jeunes, ne se sentent pas concernés, d'autres sont désabusés. »
Beaucoup s'interrogent sur la pérennité du financement. Étienne Champion, directeur de l'ARS des Hauts-de-France, a beau assurer que les crédits des CPTS seront pérennes, certains généralistes se souviennent du système du médecin référent, souligne le Dr Françoise Courtalhac, généraliste dans l'Oise. Et « quid du financement si les objectifs ne sont pas remplis ? », s'interroge un participant.
Equipe de conseillers
Pour Christophe Enderlé, pharmacien dans le Haut-Escaut, bon nombre de libéraux ont besoin d'avoir... un projet déjà bien ficelé pour être convaincus, notamment les outils d'échange et de communication. La CPTS d'Amiens prévoit par exemple de créer un carnet d'adresse mutualisé des libéraux de santé du territoire. Un dispositif que Sophie Houppermans souhaite étendre aux acteurs sociaux et médico-sociaux.
Les médecins pionniers des CPTS qui travaillent à la rédaction de leur projet s'estiment parfois peu outillés. C'est pourquoi l'URPS ML des Hauts-de-France, via l'inter URPS régionale, met à leur disposition une équipe de conseillers qui peut les épauler dans le montage du projet, sa rédaction et la mobilisation des confrères ou encore les aider à travailler sur la gouvernance, les statuts associatifs, la place des usagers et le recrutement du coordonnateur.
Une fois le projet validé, la CPTS peut commencer à mener ses actions. Celle du Grand-Douai projette de créer des protocoles pour la prise en charge de la cystite par le pharmacien ou l'accès direct au kiné en cas d'entorse ou de lombalgie. Elle prévoit aussi de former tous ses professionnels à l'ETP. Celle du Haut-Escaut envisage d'optimiser numériquement les plannings médicaux pour permettre aux patients de consulter un médecin le plus rapidement possible. En l'absence de cadre précisément balisé, la « page blanche » suscite aussi la créativité.
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