Pour le ministère de la Santé, la CNAM et tous les observateurs, le « baromètre » des URPS est jugé très fiable car – bon an mal an – près d’un médecin sur deux participe à ces élections, un taux de participation très correct au regard de ce qui existe dans d'autres secteurs.
Et cette année, l'incertitude est maximale ! Pas moins de huit syndicats se disputent le leadership et les places d’honneur. Qui sera sur le podium chez les généralistes ? Qui l'emportera chez les spés au sein du collège réunifié ? Les nouveaux invités bousculeront-ils les « historiques » ? La question est de savoir si la hiérarchie syndicale actuelle (encadré ci-dessous) sera remise en cause, et dans quelles proportions — les scores respectifs pouvant dessiner des majorités et des alliances politiques en vue des prochaines négociations conventionnelles (lire aussi page 12 et 13).
Chez les 56 329 généralistes d'abord, MG France qui avait consolidé sa première place en 2015 avec plus de 31 % des voix conservera-t-il cette position convoitée de leader ? Fidèle à son approche identitaire, le syndicat du Dr Jacques Battistoni est particulièrement offensif en cette période de vaccination en ville et — comme d'autres — n'épargne pas les autorités pour leur stratégie. Dans ce même collège, la FMF, qui avait très fortement progressé la dernière fois avec plus du quart des voix généralistes (en hébergeant sur ses listes des candidats de l'UFML qui n'était alors qu'une association) peut-elle rééditer sa performance ? Sur ce même créneau très contestataire et de l'indépendance, l'UFML-Syndicat justement, créé en 2017 sous la houlette du Dr Jérôme Marty, entend se tailler la part du lion pour acquérir sa représentativité officielle. La CSMF et le SML, qui avaient tous les deux perdu des plumes chez les généralistes, peuvent-ils rebondir ? Les deux centrales polycatégorielles ont en tout cas musclé leur communication ces derniers mois en multipliant les communiqués et newsletters.
Schismes
Dans le collège spécialiste cette fois (57 258 électeurs), les regards se porteront sur le score de la nouvelle alliance monocatégorielle du BLOC et d'Avenir Spé, une coalition calibrée pour ce scrutin. Le premier avait écrasé la concurrence dans l'ancien collège des plateaux techniques lourds en 2015 (67 % des voix), tandis que le second est issu d'un schisme récent au sein des spés de la CSMF, qui a vu plusieurs verticalités quitter la maison confédérale dans le sillage du gastroentérologue nantais Patrick Gasser. Le leadership historique de la Conf' chez les spés (la moitié des voix en 2010 et encore 40 % en 2015 hors disciplines de bloc opératoire) sera soumis à rude épreuve, même si la centrale polycatégorielle a riposté en consolidant son pôle autour du Dr Franck Devulder qui fait campagne sur la modernisation de l'exercice.
Reste à savoir enfin à quelle hauteur se situeront les deux outsiders — Union Collégiale (UC) et Jeunes Médecins (JM) — qui n'ont été admis que tardivement dans la course électorale et ne présenteront des listes que dans de rares régions.
Tous ces scores dessineront la nouvelle cartographie syndicale et le poids de chaque organisation dans les instances conventionnelles. Et lorsqu’il rouvrira les négociations avec les syndicats déclarés représentatifs, le directeur de l’Assurance-maladie, Thomas Fatôme, ne pourra ignorer les forces en présence sur l'échiquier médical.
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Patrick Hassenteufel, Professeur de science politique (Université de Versailles Saint-Quentin)
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