La sinistralité médicale est contenue. « Loin d’être explosive », de l’aveu même de la MACSF Sou médical, premier assureur de professionnels de santé en France (432 490 sociétaires, dont 134 392 médecins). Mais la situation est hétérogène selon les spécialités.
En 2013, le groupe a reçu 4 028 déclarations (4 % de moins qu’en 2012). 1,5 médecin sur 100 assurés par la MACSF a été mis en cause l’an dernier. Cette moyenne masque de gros écarts : en pédiatrie et en médecine générale, ce taux tombe à 1 %, tandis que la sinistralité s’élève à 41 % en chirurgie.
La fréquence des mises en cause baisse en anesthésie, en gastro-entérologie, en ORL, en radiologie. Ce tassement ne concerne ni les urgences, ni la chirurgie. « Chaque année, les mises en cause d’urgentistes augmentent. On reçoit des plaintes pénales liées à des décès lors de passage aux urgences », note Nicolas Gombault, directeur général du Sou médical. Qui ajoute que « le risque chirurgical demeure extrêmement élevé ».
Sept fois sur dix, le chirurgien mis en cause est condamné
Les indemnisations sont particulièrement lourdes en chirurgie, et la clémence du juge est rare : 71 % des chirurgiens mis en cause ont été condamnés. En neurochirurgie, le taux de condamnation grimpe à 87 %, et le coût moyen de l’indemnisation s’élève à 78 328 euros. La chirurgie bariatrique enregistre une sinistralité en hausse.
En anesthésie, dont la sinistralité diminue, les complications sont le principal risque. En radiologie, les erreurs d’interprétation d’échographie du cancer du sein amènent un lot important de plaintes. En dermatologie, la plupart des sinistres concerne les actes esthétiques.
Toutes spécialités confondues, 256 médecins ont été condamnés au civil, et 22 l’ont été au pénal (un praticien a reçu une peine de 18 mois ferme). Mais c’est surtout vers les commissions de conciliation et d’indemnisation (CCI) que les patients se tournent depuis quelques années. Ils n’hésitent plus à poursuivre plusieurs médecins simultanément. « Saisir une CCI est gratuit, explique Nicolas Gombault. Il n’est pas rare de voir cinq ou six médecins mis en cause dans une même affaire ».
Ainsi, quatre réanimateurs ont été condamnés in solidum pour l’absence de protocole explicite sur la réanimation, ayant entraîné des complications et des séquelles neurologiques graves sur une personne opérée d’une dissection chronique de l’aorte. Montant de la réparation : 2,7 millions d’euros (l’indemnisation la plus élevée versée en 2013).
Prescrire peut conduire devant le juge
Prescrire expose aussi à des poursuites, surtout lorsque le médicament est depuis peu sur le marché. « Les nouveaux anticoagulants oraux sont très largement prescrits avec des indications encore assez floues », observe le directeur du Sou médical, qui appelle les médecins à être vigilants lorsqu’ils rédigent une ordonnance. S’agissant des pilules de 3e et 4e générations, aucun praticien n’a pour l’heure été condamné, mais plusieurs prescripteurs ont dû rendre des comptes.
La fulguration des troubles du rythme cardiaque, hier opérée au bloc, aujourd’hui traitée par voie médicamenteuse, est un autre « point de vigilance ». De même que la chirurgie ambulatoire, érigée en priorité nationale par Marisol Touraine, alors qu’elle redistribue les responsabilités. « On n’a pas particulièrement plus de sinistres [qu’après une chirurgie classique, NDLR], mais la sortie rapide du patient nécessite de repenser toute la prise en charge », met en garde le Dr Thierry Houselstein.
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