C’est la première étude épidémiologique complète sur le sujet. Publiée dans le BEH*, elle permet de dénombrer et surtout d’identifier les causes d’« erreurs » (événements indésirables associés aux soins ou EIAS) évitables en médecine générale – et plus seulement en milieu hospitalier. La population était constituée des patients d’un échantillon de 127 généralistes tirés au sort dans le réseau des GROG.
Les 13 438 actes collectés (visites et consultations) ont donné lieu à 475 événements indésirables confirmés dont 74 étaient dus uniquement à des médicaments. Au total, donc, 401 événements indésirables ont été comptabilisés pour l’analyse ; « 344 étaient évitables » (soit 2,5 % de l’activité généraliste), précise l’étude.
L’analyse de ces 344 erreurs évitables est édifiante. 42 % étaient en rapport avec des problèmes d’organisation du cabinet. L’enquête cite le défaut de disponibilité du généraliste, des erreurs d’enregistrement des dossiers, une identification incorrecte des patients ou une défaillance dans la gestion des rendez-vous ou des messages. Les conditions de travail en cabinet caractérisées par « les phénomènes d’interruption de tâches et d’afflux d’informations non triées » sont des facteurs récurrents d’erreurs, résume l’étude.
Les EIAS graves restent exceptionnels
Une erreur évitable sur cinq (21 %) résulte de défauts « d’organisation et de communication entre professionnels et structures de santé » (avec les spécialistes, l’hôpital ou d’autres soignants).
Seulement 20 % des erreurs évitables procèdent d’un manque de connaissances ou/et de compétences (ou de mobilisation de celles-ci par le médecin). Il a pu s’agir d’erreurs de diagnostic (interrogatoire, antécédents, examen clinique, interprétation d’examens complémentaires...) ou d’erreurs de gestion des soins (traitement médicamenteux, erreurs de savoir-faire dans la gestion d’une vaccination ou d’une procédure). 10 % des erreurs évitables s’expliquent par la perte de temps attribuée au patient (avant ou durant sa prise en charge) et 3 % à une « évolution inhabituelle de la maladie ». Pour un faible pourcentage d’erreurs évitables, il n’y a eu aucun défaut clairement identifié.
Pour les trois quarts des patients, l’EIAS n’a eu aucune conséquence clinique car ils ont été « récupérés rapidement », explique l’étude. Dans 21 % des situations, l’erreur a entraîné une incapacité temporaire (infection urinaire liée à une erreur de traitement, retard diagnostique entraînant une opération). Les EIAS ayant eu des conséquences « cliniquement graves » restent exceptionnels. L’étude souligne toutefois le décès évitable d’un patient de 87 ans insuffisant cardiaque qui n’a pu avoir d’avis spécialisé dans les délais.
* Bulletin épidémiologique hebdomadaire.
Étude épidémiologique en soins primaires sur les événements indésirables associés aux soins en France (Esprit 2013). Travail coordonné par le Pr Philippe Michel.
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