DE NOTRE CORRESPONDANTE
AVEC 60 000 habitants dont un quart ont plus de soixante ans, le territoire d’Hesdin, dans le Pas-de-Calais ressemble à beaucoup d’autres territoires français : une population rurale vieillissante qui nécessite une prise en charge médicale de plus en plus importante et, parallèlement, une démographie médicale en berne. Le secteur est sous-doté et nombre de praticiens sont proches de la retraite – 76% des médecins du triangle hesdinois ont plus de 48 ans. Certaines zones connaissent des situations à donner le vertige : 57 ans de moyenne d’âge dans la ville d’Hesdin, 62 ans à Auxi !
Dans ce contexte, à la fin de l’année 2008, l’annonce par la Fondation Hopale, propriétaire de la clinique de Hesdin, de l’arrêt total de l’activité chirurgicale ambulatoire fait l’effet d’une bombe ! Car elle signifie une fuite des rares spécialistes encore présents dans le secteur, et une désertification encore accrue.
Fondée en 1988 par deux chirurgiens, la clinique d’Hesdin s’était taillé une solide réputation, grâce à la notoriété du Dr Guy Fichelle, médecin de l’équipe de France d’athlétisme et de l’équipe de Lens. La clinique était classée au dix-huitième rang français pour les prothèses de genou.
En 2000, l’établissement est vendu à la Fondation Hopale (propriétaire de plusieurs hôpitaux sur le littoral) en même temps que la clinique de Saint-Pol. Commence alors un lent déclin. Le secteur d’hospitalisation est fermé quelques années plus tard, et l’activité chirurgicale atteint tout juste une centaine d’interventions par mois.
En novembre de l’année dernière, l’annonce de la fermeture totale du bloc provoque un tollé. « Les professionnels de santé craignaient à terme la disparition de toutes les spécialités et se sont mobilisés très rapidement pour racheter la clinique », explique le Dr Marc Biencourt. Ce généraliste a orchestré avec un confrère, le Dr Jean-Charles Boubert, une campagne de mobilisation des professionnels du secteur, laquelle campagne, très vite, a porté ses fruits puisque l’activité de la clinique est repartie à la hausse. Réunis en association, ces professionnels ont franchi un cap spectaculaire avec une opération de rachat. Généralistes, spécialistes, kinés, infirmières, opticiens… ils sont 94 au total à s’être portés acquéreurs – pour l’euro symbolique – de l’activité chirurgicale, le 16 mai 2009 ; ils ont créé pour cela une société à actions simplifiées. Chacun a mis au pot entre 1 000 et 2 000 euros, « sans espoir de les récupérer un jour », souligne le Dr Biencourt.
Trois fois plus d’interventions.
L’ARH ayant donné son accord pour une reprise à condition que soit créée une activité d’ophtalmologie, la nouvelle équipe a investi dans un plateau technique très performant, avec le soutien financier de la mutuelle Apreva. Aujourd’hui, la Clinique des 7 Vallées couvre donc les spécialités d’ophtalmologie, gastro-entérologie, ORL, stomatologie, urologie, gynécologie et chirurgie générale. Une quarantaine de spécialistes y exerce en temps médical partagé. En l’espace de quelques mois, le nombre d’interventions est passé de 100 à 300 par mois, avec un objectif d’une centaine par semaine à l’horizon 2010.
« L’activité de la clinique répond à une véritable problématique de santé publique, insiste Marc Biencourt. En ophtalmologie, le secteur était sinistré ! Nombre de personnes âgées n’ont pas vu de spécialiste depuis dix ans. Pour réaliser une opération de la cataracte, un patient d’Hesdin devait effectuer dix allers-retours en TER jusqu’à Etaples. »
Dix conventions de coopération ont été signées avec les hôpitaux voisins et les cliniques privées du secteur afin de réaliser un maillage de l’ensemble du territoire. Cet ensemble d’établissements travaillera en articulation avec les quatre maisons de santé pluridisciplinaires du bassin de population. Un interface mis au point par la société NCS a été développé pour faciliter les échanges d’informations en temps réel entre tous les professionnels du réseau. Ce système, baptisé logiciel 3 Mondes, utilisable quel que soit le logiciel de l’utilisateur, est le deuxième installé en Europe, après Bruxelles. Il favorisera un véritable travail en réseau.
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