Faire quelque chose, mais quoi ? En appelant, il y a un mois à un « grand débat national sur la consommation de drogue et ses effets délétères », Emmanuel Macron a reconnu l’ampleur du problème dans l’Hexagone. Sans pour l’heure y apporter ni changement de cap, ni solutions concrètes, hormis l’accent mis sur les succès supposés de son gouvernement en matière policière. Avec 1,4 million de consommateurs quotidiens et près de 5 millions de fumeurs réguliers, la France détient pourtant le record d’Europe de la consommation de cannabis. Cela signe l’échec de la politique menée par le pouvoir actuel et ses prédécesseurs. La faute en partie à un cadre législatif dépassé – la loi de 1970- que personne jusque-là n’a vraiment osé remettre en cause.
Le problème est compliqué à résoudre, parce qu’il soulève des enjeux à la fois sociétal, social, sanitaire, policier et même géopolitique. Et surtout parce qu’il touche à l’insécurité, débat sensible s’il en est, comme en témoignent les réactions provoquées par le verdict d’irresponsabilité pénale dans l’affaire Halimi ou par le meurtre d’un brigadier d’Avignon par un dealer. D’un point de vue de santé publique, les études se sont succédé ces dernières années pour démontrer la dangerosité de la consommation de cannabis, aux plans neurologique, psychiatrique et pulmonaire, notamment. Et, face à cet enjeu, la réponse des autorités est de plus en plus répressive. Un récent rapport d’experts pour le compte de l’Office français des drogues et des toxicomanies (OFDT) en a fait récemment la démonstration. Même l’injonction thérapeutique (pour laquelle, il est vrai, les professionnels de la toxicomanie ne se sont jamais battus) semble marginalisée désormais. Quant à l’amende forfaitaire mise en place en 2020, en dépit de 70 000 verbalisations en quatre mois, il n’est pas prouvé qu’elle ait fait baisser ni le nombre de dealers ni celui des consommateurs…
Dans ce contexte d’urgence sociale et sanitaire, il ne s’agit plus d’opposer les laxistes aux rigoristes comme ce fut longtemps le cas en matière de toxicomanie, mais d’essayer de dépasser ce débat, de le dépassionner aussi, en cherchant les solutions les plus efficaces pour contrer ce fléau. Ça bouge chez les politiques. Pendant plusieurs mois, une mission parlementaire a planché sur le sujet. Et elle estime que seule une libéralisation régulée du cannabis permettra d’améliorer la situation. Les acteurs du secteur – à l’instar du Dr Jean-Michel Delile dans ce numéro — plaident aussi pour un changement de la législation qui empêche toute vraie politique de prévention et gêne l’accès à la prise en charge. À un an de la présidentielle, Macron peut-il toutefois s’aventurer sur ce terrain ? D’autres à l’étranger l’ont fait avant lui. Mais avec un ministre de l’Intérieur qui prône le tout répressif, un ministre de la Santé discret sur ce dossier et face à une Marine Le Pen qui n’attend que ça, il patientera sans doute jusqu'à un éventuel nouveau quinquennat.
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