QUELQUES jours à peine après sa nomination aux Affaires sociales et à la Santé, Marisol Touraine s’est pliée à un exercice imposé : la tournée des stands d’Hôpital expo, sous l’œil scrutateur des caméras et du microcosme hospitalier, suivie d’un discours inaugural devant plusieurs centaines de professionnels de santé.
Le président de la Fédération hospitalière de France (FHF), Frédéric Valletoux, l’a accueillie d’un large sourire. Le discours de campagne de François Hollande sur la santé avait fait écho aux attentes de la FHF. Aux yeux du maire UMP de Fontainbleau, « point besoin de grande loi », mais plusieurs actions prioritaires à mener, à commencer par la fin de la convergence tarifaire public privé, « absurde et dangereuse », ainsi que « la réinscription dans la loi de l’indivisibilité de la notion de service public ». Dans l’assistance, les représentants des cliniques privées – Jean-Loup Durousset et Lamine Gharbi en tête – ne sont pas franchement à la noce.
Le mot cœrcition banni du vocabulaire.
Lorsque la ministre prend la parole, l’attention se lit sur tous les visages. Certains prennent des notes. Marisol Touraine n’a pas encore composé son cabinet, et l’étendue de ses attributions, à ce stade, n’est pas clairement établie. C’est donc prudemment que la nouvelle ministre se lance. Elle prévient : « L’heure de la concertation n’est pas advenu ». Trop tôt pour présenter des mesures détaillée ; l’heure est au cap général, aux grandes orientations.
Marisol Touraine a pris quatre engagements devant le parterre hospitalier. Premier de ces engagements, en écho à la promesse du nouveau président : l’ouverture rapide d’une négociation sur les dépassements d’honoraires. « L’objectif fixé est clair : la limitation, région par région, spécialité par spécialité, des dépassements d’honoraires », a précisé la ministre, sans indiquer quelle serait la méthode poursuivie. Place, d’abord, à la discussion, qui « ne pourra excéder quelques mois », et qui associera « l’ensemble des acteurs concernés ». « Le gouvernement assumera ses responsabilités » si la négociation échoue, a déclaré Marisol Touraine.
Mettre tous les Français à moins de 30 minutes d’un service d’urgences : Marisol Touraine a repris à son compte cette autre promesse de campagne du candidat socialiste. Pour y parvenir, elle déclare faire
« confiance aux acteurs de proximité pour mettre en place les dispositifs les mieux adaptés ». Il serait prématuré de se mettre à dos le corps médical : le mot coercition est soigneusement banni du vocabulaire de la nouvelle ministre. Y compris sur la question clé des déserts médicaux, c’est une « approche concertée et territorialisée » qui prévaudra. Les Agences régionales de santé doivent encourager les expérimentations locales, et non « se substituer aux responsabilités qui incombent aux professionnels de santé ».
Mal être.
Deuxième engagement : « la réaffirmation du rôle central du service public hospitalier », qui passera, comme le réclame la FHF, par la réintroduction dans la loi du terme même de service public hospitalier. Applaudissements nourris de la salle à cet instant précis, et lorsque la ministre ajoute : « Le préalable que je pose à toute discussion sur l’avenir de l’hôpital est la fin de la convergence tarifaire ». Marisol Touraine a combattu la loi HSPT, mais elle ne la réécrira pas de fond en comble. « Mieux vaut des aménagements bien négociés que des lois d’affichage qui n’aboutissent à rien d’autre qu’à fragiliser les professionnels » : une façon indirecte de critiquer la façon dont le gouvernement Fillon a mené la réforme de la gouvernance hospitalière.
Que fera-t-elle du décret redéfinissant les prérogatives des CME dont les médecins espéraient la sortie avant l’élection présidentielle ? Quelle suite donnera-t-elle à l’accord cadre signé par Xavier Bertrand en début d’année, qui prévoyait de restaurer l’attractivité des carrières médicales à l’hôpital, mais qui est depuis resté lettre morte ? A ce stade, Marisol Touraine ne se prononce pas sur le sujet.
Consciente du « mal être » qui règne à tous les étages à l’hôpital, la ministre, et c’est son troisième engagement, a promis de rencontrer prochainement l’ensemble des organisations syndicales hospitalières. Au programme, la restauration du dialogue social et l’instauration d’un « pacte de confiance » avec l’ensemble des personnels hospitaliers.
La FHF salue le volontarisme, MG France le pragmatisme.
Dernier engagement, enfin : la reconfiguration complète des parcours de soins, batis non plus autour des structures existantes, mais en fonction des besoins des patients. Il faut « aller plus loin » en matière de décloisonnement ville hôpital, a insisté Marisol Touraine, pour qui l’hôpital « a vocation à être recentré sur ses missions fondamentales ».
Frédéric Valletoux a salué un discours « volontariste » qui reprend plusieurs des priorités de la FHF.
Le Dr Claude Leicher, président de MG France, s’est dit intéressé par le propos « pragmatique et non idéologique » tenu par celle qui succède à Xavier Bertrand. « De mon point de vue, le temps du secteur optionnel est terminé. Passons à autre chose. Il faut mener une grande réflexion sur les parcours de santé », déclare le Dr Leicher. Luc Delrue (FO santé) regrette pour sa part que la ministre n’ait pas décidé de rompre avec la logique de l’enveloppe fermée de l’ONDAM, à ses yeux responsable, avec la loi HPST, des difficultés des hôptiaux.
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