CHAQUE JOUR, un nouveau service emménage au Centre hospitalier sud-francilien (CHSF). L’hôpital a des allures de ruche fiévreuse. Les déménageurs suent, le service logistique est sur le pont. Dans les unités déjà installées, le bruit des perceuses résonne encore. Les blouses blanches débusquent des problèmes, les bleus de travail corrigent le tir.
Une urgence arrive en coronographie. Un double infarctus, l’homme a 40 ans. L’équipe s’active. Un électricien entre dans la salle, en ressort quelques minutes plus tard. Sûr de son diagnostic : « Il va falloir bouger une prise électrique car les médecins ont déplacé un équipement ». Quatre ans et demi qu’il travaille ici, il a vu la première pierre. Sa mission devrait être finie. Il fait du rab pour traiter « les demandes des médecins qui arrivent au compte-gouttes ».
Au fond du couloir, une brouette déborde de parpaings. Une feuille A4 au mur : « Accès interdit, travaux IRM ». « Bientôt, s’enthousiasme le Dr Pascal Goube, nous aurons un plateau technique complet, et le projet pour la prise en charge des AVC pourra débuter. Le nouvel hôpital est une étape majeure ». Si l’activité décolle, le chef du service de cardiologie espère décrocher une autorisation pour la rythmologie lourde. « Et pourquoi ne pas imaginer le transfert d’un service de chirurgie cardiaque de l’AP-HP jusqu’ici, se prend-il à rêver. Ça permettrait de financer l’hôpital ».
Manque de fonctionnalité
Le déménagement de la cardiologie, énergivore, s’est passé sans encombre : il s’est écoulé moins de 24 heures entre le dernier infarctus pris en charge à Corbeil, et le premier traité au CHSF. À la veille d’une visite de conformité, le Dr Goube se montre serein : « Il y a eu quelques problèmes informatiques, mais nous travaillons en sécurité ».
À la tête du service de rééducation, le Dr Philippe Dupont n’affiche pas le même sourire. Pendant un an et demi, ses remarques sur le manque de fonctionnalité de ses futurs locaux sont restées lettre morte. À quinze jours du déménagement, il a menacé de ne pas bouger. « Et là, raconte-t-il, tout est devenu modifiable ». Eiffage a mené des travaux en urgence. Les barres d’appui dans les couloirs seront installées plus tard, mais au moins l’unité est-elle aux normes. À quelques détails près : dans la salle de balnéothérapie, le couloir de marche flambant neuf a subi des aménagements, mais aucun patient ne l’a testé, car le pH de l’eau du bassin n’est pas conforme.
Première arrivée, la psychiatrie a pris ses quartiers dans le nouvel hôpital le 23 janvier. Panne d’électricité ce soir-là : dîner à la bougie, 18 degrés au thermomètre. Le chef du pôle tait l’anecdote et préfère insister sur la qualité hôtelière des nouvelles chambres. « Avant, expose le Dr Michel Fouillet, les unités étaient clairsemées en ville, les locaux étaient dégradés. À présent, la psychiatrie est enfin considérée, et des projets vont voir le jour, comme la sismothérapie ».
Tous les praticiens du CHSF ne partagent pas l’enthousiasme du Dr Fouillet. Sous couvert d’anonymat, certains s’inquiètent pour la qualité des soins. La légionelle était présente dans les canalisations jusqu’à l’arrivée de l’eau chaude, en novembre. Ce généraliste installé à Évry a eu vent de la rumeur. Ayant en tête le spectre de l’HEGP, il préfère jouer la prudence. « Pour le moment, dit-il, j’adresse un peu plus mes patients vers les cliniques. J’attends de voir comment tourne le nouvel hôpital ».
Au sein même du CHSF, des médecins redoutent une dégradation de la qualité des soins. Le Dr Alexis Mosca le dit ouvertement. Les urgences pédiatriques qu’il dirige emménageront dans 15 jours dans un espace « non adapté », sans biberonnerie ni chambre mère-enfant, avec une salle d’attente exiguë au possible, et surtout, moins de lits. « On va devoir renvoyer chez eux des enfants limites », s’inquiète le pédiatre. « Prendre une garde en sachant qu’il n’existe aucune place d’hospitalisation, c’est démotivant, dit-il. L’équipe alterne entre la résignation et le désespoir. Nous sommes très loin des conditions d’accueil d’un hôpital moderne ».
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