Si les enfants sont peu à risque de développer une forme grave de Covid, leur vaccination pourrait être envisagée pour espérer atteindre l'immunité collective. Plusieurs essais sont en cours chez les enfants et les adolescents.
« Les enfants ont d'abord été écartés des essais vaccinaux », indique au « Quotidien » le Pr Robert Cohen, pédiatre, infectiologue et président du Conseil national professionnel de la pédiatrie, soulignant le rôle mineur des enfants dans la dynamique épidémique. La donne a toutefois changé en décembre avec l'arrivée de nouveaux variants, plus contagieux.
Vacciner au moins 80 % de la population
« Des arguments se sont accumulés pour montrer que les vaccins protégeaient de la maladie mais aussi du portage viral, même si cet effet n'est pas encore quantifié », poursuit le Pr Cohen. Cet effet sur la transmission suggère que la vaccination, sous condition d'une couverture suffisante, pourrait permettre d'atteindre l'immunité collective. Toutefois, « si les nouveaux variants changent le R0 de la maladie, on ne peut plus se contenter de 60 à 70 % de la population immunisée pour contrôler l'épidémie, mais il faut compter au moins 80-90 %, voire plus, ce qui se semble difficile à atteindre sans vacciner les enfants et les adolescents », constate l'infectiologue.
Au-delà de l'intérêt collectif évident, le bénéfice individuel doit être évalué. « Quand on prend en compte le bénéfice uniquement lié à la maladie, il est relativement modeste », résume le Pr Cohen, relevant néanmoins les milliers d'enfants hospitalisés en France. Mais le bénéfice repose surtout sur le retour à une scolarité normale : « les fermetures des écoles et les fonctionnements perturbés des collèges et des lycées ont déstabilisé la santé mentale et somatique des jeunes », déplore-t-il.
Une bonne immunogénicité
Les vaccins à ARNm sont ainsi évalués chez les moins de 18 ans, les essais prévus avec les vaccins d'AstraZeneca et de Johnson et Johnson ayant été suspendus. Le vaccin de Pfizer/BioNTech, autorisé chez les 16 ans et plus, a montré de bons résultats chez les 12 à 15 ans dans une étude menée auprès de 2 260 sujets aux États-Unis. Un dossier d'autorisation de mise sur le marché (AMM) devrait être déposé auprès de l'Agence européenne des médicaments par les laboratoires qui ont déjà annoncé une efficacité de 100 % (18 cas de Covid avec le placebo et aucun dans le groupe vacciné). Le Pr Cohen nuance : « il y a trop peu de cas pour affirmer une efficacité de 100 % ». De plus, note-t-il, « il sera difficile d'avoir des résultats d'efficacité clinique alors que la maladie est peu fréquente chez les enfants, qui font beaucoup de formes asymptomatiques ».
Néanmoins, l'immunogénicité est supérieure à celle observée chez les 16-25 ans et la tolérance à court terme est bonne. « Plus l’effet bénéfique individuel est faible, plus le niveau de tolérance doit être élevé », souligne l'infectiologue, qui insiste sur l'importance du suivi de pharmacovigilance.
Les laboratoires Pfizer/BioNTech mènent aussi une étude chez les enfants de 6 mois à 11 ans, et deux études de Moderna sont en cours, l'une parmi les 12 à 17 ans, la seconde chez les 6 mois à 11 ans. Si les résultats de ces études se révèlent satisfaisants, le pédiatre considère possible un scénario selon lequel la vaccination des adolescents pourrait se faire dès la rentrée de septembre.
En France, les enfants à très haut risque de forme grave de Covid ont commencé à être vaccinés hors AMM. Il s'agit notamment des enfants présentant des déficits immunitaires spécifiques de la voie de l’interféron de type I.
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