TUNIS, Le Caire, Damas, Saana. Les manifestants des révolutions arabes de 2011 nous renvoient cinquante ans plus tôt, à Lisbonne. Deux étudiants portugais qui portaient un toast à la liberté sous la dictature de Salazar étaient jetés en prison. De « l’appel pour l’amnistie » que lança en leur faveur l’avocat britannique Peter Berenson, relayé dans une vingtaine de pays (en France par « Le Monde), allait naître Amnesty International . L’association était portée par une intuition : le nombre des protestataires est capable de changer la donne des droits de l’homme. Cinquante ans plus tard, ils sont plus de 3 millions de personnes à se mobiliser pacifiquement à travers 150 pays pour défendre l’ensemble des droits inscrits dans la Déclaration universelle de 1948, au sein d’une association mondiale qui a reçu le prix Nobel de la paixen1977.
Les archives de ce demi-siècle sont publiées sous la forme d’un album de mémoire : une riche iconographie dialogue avec des écrivains, artistes et témoins divers. Parmi eux, l’ex-président de Médecins sans frontières (MSF), Rony Brauman, relève que, en un demi-siècle, Amnesty « a élargi son champ d’action pour intervenir maintenant sur des sujets qui étaient traditionnellement ceux d’une organisation comme MSF, avec des engagements en faveur du droit à la santé. Il y a l’action "rights-based" et l’action "needs based" », analyse-t-il, se déclarant tenant de la seconde. « Dans le cas de la santé, si la peur de la maladie et le besoin de se soigner sont universellement ressentis, en parler comme d’un droit ne va pas de soi (…) On ne décrète pas la mise en place dans un pays d’un système égalitaire et effectif de soins comme on décide de ne pas réprimer l’expression d’opinions critiques. » Et Rony Brauman d’estimer qu’« il serait ridicule pour MSF de débarquer aux USA pour expliquer aux Américains que les dizaines de millions de personnes qui n’ont pas accès aux soins représentent un déni de droit. »
Dans la durée.
L’universalité des droits humains reste donc problématique. Et celle des militants d’Amnesty aussi : en déroulant le film de son histoire, l’association se garde de toute autosatisfaction et même n’hésite pas à pointer ses propres faiblesses, en tête desquelles un énorme déficit au Sud : 98 % des financements de l’organisation et 92 % de ses militants viennent des pays du Nord. Un redéploiement géographique est la priorité pour les dix ans qui viennent.
Quant aux succès remportés par les réseaux sociaux qui propagent l’indignation mondialisée, ils ne démonétisent pas l’organisation : face au risque de l’éphémère, Amnesty entend prendre le relais des revendications dans la durée, elle n’abandonne pas le combat une fois passé l’événement. Depuis 1961, le mythe fondateur de la petite bougie encerclée de barbelés joue le temps et la ténacité contre les forces d’oppression.
* « Amnesty International a 50 ans », par Aurine Crémieu et Philippe Lefait, 310 p. Cherche-Midi, 29 euros..
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