SON « VRAI MÉTIER », confie-t-elle, c’est la médecine physique et de réadaptation, comme attachée des hôpitaux à Thonon-les-bains (Haute-Savoie). Mais son militantisme au sein d’Amnesty est aussi devenu pour le Dr Nathalie Berger une forme d’activité professionnelle. Étudiante à Créteil, elle compta parmi les tout premiers adhérents de l’association en France, dans les années 1970 ; à l’époque pour militer contre la peine de mort, « ce châtiment profondément injuste et cruel ». « J’ai commencé à rédiger des dizaines de lettres à la main, se souvient-elle ; il n’y avait pas d’ordinateurs, j’ai découvert que le stylo et les cartes postales pouvaient être des armes efficaces. » Installée en Haute-Savoie, elle rejoint un groupe local balbutiant. « Je m’engageais aussi dans le tout premier réseau santé créé à Évian, raconte-t-elle, pour sensibiliser les médecins à leurs responsabilités en faveur des droits de l’homme et pour l’abolition de la torture. Nous étions quelques confrères très militants. »
En 2007 la section française d’AI lui confie la responsabilité de la coordination États-Unis. Elle reçoit les rapports sur la guerre contre le terrorisme, la prison de Guantanamo, participe aux campagnes demandant la fermeture du camp et la fin des arrestations illégales. Sous son impulsion, plus de 30 000 cartes de soutien sont envoyées à des détenus. « Comme médecin, explique-t-elle, la situation de ces personnes retenues sans jugement me touche encore plus. ». Elle se déclare « horrifiée » par le comportement de ces collègues américains, médecins militaires, dont un rapport d’Amnesty, publié en 2006, dénonce le rôle. On apprend que ces praticiens en uniformes ont été complices dans la mise au point de méthodes d’interrogatoire psychologiques et physiques utilisés pour questionner des détenus de la prison d’Abou Ghraïb (Irak) et de Guantanamo ; les dossiers médicaux ont servi à concevoir des plans d’interrogatoire personnalisés (privation de sommeil, isolement prolongé, exposition à des températures extrêmes).
« Cela me donne la chair de poule, confie-t-elle, mais quand j’en parle avec des collègues, je m’interroge sur ma propre conduite : qu’aurais-je fait moi-même si on m’avait amené un prisonnier blessé en me demandant de lui administrer des antalgiques, avec l’éventualité que ces antidouleurs permettent de lui faire subir de nouveaux interrogatoires ? »
« Aujourd’hui, ajoute le médecin-coordinateur, Amnesty n’a pas la preuve que les mauvais traitements ont pris fin dans les prisons américaines. Mais 48 prisonniers y sont encore détenus à vie sans jugement. Le combat continue. ».Un combat très chronophage : pour boucler un rapport sur les dix ans de Guantanamo, le Dr Berger a travaillé de 100 à 140 heures par mois depuis le 2 septembre, en ne s’accordant qu’un week-end de liberté. « Mais le retour sur investissement est fabuleux, assure-t-elle, quand par exemple les deux ex-détenus français de Guantanamo que j’ai pu rencontrer m’ont confié que nos interventions en leur faveur, avec l’envoi de nos cartes, leur ont permis de tenir. »
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