« C’EST TRÈS TRISTE et très préjudiciable pour les victimes », s’exclame Catherine Brault, avocate et référente victimes au sein de l’Antenne des mineurs du barreau de Paris en apprenant la décision du Conseil constitutionnel*. La haute juridiction vient en effet de censurer un article de la loi du 8 février 2010 qui a inscrit l’inceste commis sur les mineurs dans le Code pénal. La censure vise l’article 222-31-1, qui dispose que « les viols et les agressions sexuelles sont qualifiés d’incestueux lorsqu’ils sont commis au sein de la famille sur la personne d’un mineur par un ascendant, un frère, une sœur ou par toute autre personne, y compris s’il s’agit d’un concubin d’un membre de la famille, ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait ».
Les Sages, qui statuaient sur une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), ont considéré que « le principe de précision de la loi pénale impose que le législateur désigne précisément les personnes qui doivent être regardées, au sens de cette qualification, comme membres de la famille ». La loi de 2010 précisait pour la première fois la notion d’inceste par rapport aux autres formes de viol et d’agression sexuelle caractérisées par la violence, la contrainte, la menace et la surprise. Avant ce texte, plusieurs dispositions pénales réprimaient les atteintes sexuelles commises sur mineurs par un ascendant ou une personne ayant autorité, sans que le terme « inceste » apparaisse.
« L’inceste, qui repose sur l’abus de la confiance spontanée des mineurs dans les adultes qu’ils côtoient au sein de la famille, a des conséquences psychologiques souvent plus destructrices que les autres formes d’agression et est passible de 20 ans de réclusion criminelle », indiquait la Haute Autorité de santé dans un rapport publié en juillet 2011. Près de deux millions d’adultes pourraient en avoir été victimes pendant leur enfance, estimait la HAS, en soulignant que 90 % des incestes ne seraient pas signalés à la justice. Le pédopsychiatre Gilbert Vila avait, à cette occasion, précisé que l’inceste n’était pas forcément déterminé par un lien matrimonial mais, de manière générale, exercé par toute personne ayant une autorité de droit ou du fait sur la victime.
Où s’arrête la famille.
Sans contester au législateur le droit d’instituer une qualification pénale particulière pour réprimer l’inceste, le Conseil constitutionnel considère que la définition retenue, qui vise les actes commis « au sein de la famille », implique indirectement une définition de la famille. Or, souligne la décision, « le code civil ni aucun autre texte législatif ne donnent une définition précise de la famille ». « La notion même d’inceste implique de définir une limite de proximité familiale au-delà de laquelle les relations sexuelles sont admises », est-il ajouté.
L’abrogation de l’article prend effet immédiatement et est applicable à toutes les procédures non définitivement jugées. Lorsque l’affaire est définitivement jugée, le Conseil constitutionnel considère que la qualification « d’inceste » doit être retirée du casier judiciaire. « C’est une mauvaise nouvelle », déplore Me Brault qui dit ne pas comprendre la position du Conseil constitutionnel. « Nous avions pourtant pris moult précautions. Nous allons repartir au combat car notre but reste d’inscrire l’inceste dans le code pénal ».
* Décision n°2011-163 QPC du 16 septembre.
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