Le petit Francesco, 7 ans, résidant dans la région d'Ancône, en Italie, était sujet à des otites qui avaient « toujours été bien soignées par l’homéopathie » (dixit ses parents). Mais le mois dernier, la fièvre a augmenté pendant deux semaines et l’enfant, traité uniquement par des granules et des gouttes homéopathiques, est décédé le 27 mai, peu après son admission aux urgences. Le médecin de famille, homéopathe, accusé d’homicide par négligence, a été suspendu, dans l’attente d’une décision de justice.
Pour le président de l’Ordre de Rome cependant, « la chasse aux sorcières et la mise au ban de l’homéopathie est dangereuse, alors que, dans cette affaire, il s’agit d’une décision malheureuse prise par un médecin. » L’émotion a franchi les frontières. Et le président du Syndicat national des médecins homéopathes français (SNMHF), le Dr Charles Bentz, est monté au créneau, expliquant : « En tout état de cause, l’efficacité d’un traitement doit dans ce type de pathologie être réévalué régulièrement en fonction des signes cliniques. Un changement de stratégie thérapeutique s’impose en cas de non-amélioration. Dans ce cas particulier, il semble évident que le traitement homéopathique seul ne pouvait plus se justifier. » Et le SNMHF de s’élever « contre tout propos qui tendrait à utiliser ce cas malheureux pour jeter le discrédit sur l’ensemble des médecins homéopathes. »
Mais alors que l’opinion est hyper-susceptible dès qu’éclate la moindre affaire dans le domaine de la santé, le procès de l’homéopathie n’a pas été ouvert. « Aucun de mes patients ne m’a interrogé sur ce cas dramatique, assure le Dr Bentz. Et alors que nous avions adressé un mail à l’ensemble de nos adhérents, nous n’avons eu aucun retour pour nous signaler des réactions mettant en cause nos modalités d’exercice et nos valeurs, telles que les exprime notre charte. »
Demande de déremboursement.
L’affaire d’Ancône n’a apparemment pas entamé la confiance des usagers-adeptes. Pas plus que les controverses récurrentes qui, depuis des lustres, s’en prennent à la plus controversée des médecines non conventionnelles (MNC). L’homéopathie est toujours exclue du tronc commun des études médicales. Elle n’a pas droit de cité dans les revues à comité de lecture. Ses effets thérapeutiques ne sont pas validés par des essais en double aveugle (lire ci-contre). De ce fait, ils font l’objet d’un régime spécial d’AMM (autorisation de mise sur le marché, voir encadré).
Dans un rapport incendiaire adopté à la quasi-unanimité en 2004 (deux voix contre), l’Académie nationale de médecine a dénoncé « l’illégalité totale » des produits homéopathiques, au motif qu’ils sont « présentés abusivement comme efficaces dans des secteurs variés », alors que le Code de la santé spécifie qu’un médicament doit présenter un intérêt thérapeutique, preuves par essais cliniques et pharmacologiques à la clé. Et l’Académie d’emboîter le pas à la Commission de la transparence de l’AFSSAPS (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé) en demandant le déremboursement des produits homéopathiques. Au demeurant, l’économie pour la CNAM ne comblerait pas le déficit de l’assurance-maladie (lire encadré).
73 % de taux de confiance
Et pourtant, les cabinets des 3 581 homéopathes inscrits au CNOM ne désemplissent pas. En 1982, 16 % des Français déclaraient avoir recours au moins occasionnellement à l’homéopathie. 25 ans plus tard, 58 % des mères de famille ont laissé des granules fondre sous la langue de leurs enfants au cours des 12 derniers mois (enquête BVA pour Dolisos). Toutes les études réalisées en France le confirment. À la question « Faites-vous confiance à l’homéopathie ? », 52,9 % répondent « oui », contre 36,3 % qui disent « non » (sondage IPSOS pour Boiron 2016). Un score approchant celui enregistré par le site du CISS, 66millionsdimpatients.org, avec 64 % de oui et 36 % de non.
Le sondage IPSOS réalisé pour Boiron en 2016 mesure même un niveau de confiance en hausse de deux points par rapport à la précédente enquête, à 73 %. Un chiffre d’autant plus remarquable que, dans le même temps, l’Observatoire sociétal du médicament, créé par le LEEM (les entreprises du médicament, dont Boiron, leader mondial du médicament homéopathique, est adhérent) observe dans sa dernière livraison (octobre 2016) une « baisse de l’intensité de la confiance qui se répercute sur tous les types de médicaments, à l’exception de l’homéopathie » : 73 % des personnes interrogées déclarent avoir « tout à fait confiance » dans l’homéopathie (+ 2 %), contre 20 % qui ne lui font pas confiance (- 1 %), alors que l’Observatoire constate une défiance qui progresse à l’égard des vaccins (69 %, en baisse de 2 %) de même qu’envers les antibiotiques (68 %). Et dans le top 10 des médicaments d’automédication les plus vendus, Oscillococcinum, en progression de 25 %, talonne désormais le leader Doliprane. Instruit en haut lieu médical, le procès de l’homéopathie n’est décidément pas à l’ordre du jour.
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