LE RAPPORT rédigé par 4 membres de l’IGAS (Fadéla Amara, Danièle Jourdain-Menninger, Myriam Mesclon-Ravaud et le Dr Gilles Lecoq) connaît ses limites. Les données manquent pour appréhender précisément la réalité du handicap psychique et, si l’on sait qu’environ 30 % des Français souffrent de troubles mentaux, « il reste impossible de déterminer la part des personnes dont l’altération psychique entraîne un handicap réel ». Les inspecteurs déclarent eux-mêmes « n’être pas en mesure de procéder à une évaluation complète compte tenu du caractère récent de cette politique publique ». Néanmoins, ils ébauchent un tableau instructif des avancées introduites par la loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
La législation a d’abord, en reconnaissant le handicap psychique, donné un souffle nouveau aux structures d’hébergement et de travail pour les adultes, qui s’est traduit concrètement par la création des Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). Les interactions dans l’accompagnement familial, social et sanitaire ont vu leur importance renforcée, dans un contexte de moindre recours à l’hospitalisation. La valorisation des aidants familiaux par la loi de février 2005 est en ce sens significative, tout comme la mise en place des services d’accompagnement à la vie sociale (SAVS) ou d’accompagnement médico-social pour adultes handicapés (SAMSAH « psy »). Au chapitre du logement, les élus et les bailleurs jouent un plus grand rôle, notamment pour faciliter le maintien dans leur habitat de personnes parfois en crise, incomprises du voisinage. Le rapport souligne également l’impulsion conférée par plusieurs plans (2 de santé mentale, le programme pluriannuel de création de places 2008-2012 et le plan de relance) à l’accueil intermédiaire, entre hospitalisation au long court et logement intermédiaire. Quant à l’accès au travail, les progrès escomptés se font attendre. « Selon les différentes enquêtes, il y aurait entre 9 000 et 30 000 personnes handicapées en demande d’emploi, moins de 5 % feraient l’objet d’un placement ». La progression de places dans les établissements et services d’aide par le travail (ESAT) (de 13 % en 2007 à 18 % en 2008 pour le handicap psychique) ne suffit pas à répondre à la demande, même si la loi facilite le recours à ces structures pour les entreprises, et créé des formules alternatives comme les ESAT de transition.
Les enfants atteints de handicap psychique ont également profité des retombées de la loi de février 2005, qui, faisant de l’inclusion scolaire une priorité, a établi les projets personnalisés de scolarisation pour la quasi-totalité de ces élèves. Leur intégration dans l’école publique ou l’université progresse : on recensait 35 062 enfants handicapés psychiques en milieu ordinaire en 2010, contre 28 272 en 2006 et 10 544 étudiants handicapés en 2008-2009 contre 6 470 en 1990-2000.
Inégalités et désorganisation.
Si la lettre de la loi de 2005 plaide ainsi pour une meilleure reconnaissance et intégration du handicap psychique, elle n’a pour l’instant pas suffit à faire bouger l’esprit des partenaires, des institutions, et de l’ensemble de la société. Les rapporteurs soulignent plusieurs « points de vigilance » qui laissent deviner, par transparence, autant de critiques.
Ils attirent l’attention sur les difficultés rencontrées par les handicapés pour se loger dans les grandes villes, dont le parc social explose, et suggèrent le renforcement des services d’accompagnement. Ils estiment en outre « indispensable de maintenir les possibilités d’accueil dans les établissements adaptés à la réalité du handicap psychique lorsque la solution du logement ordinaire ou le maintien dans la famille s’avère impossible ».
L’état des lieux n’est pas meilleur pour le travail. « Les dispositifs prévus pour le maintien dans l’emploi ne concernent qu’un nombre très réduit de personnes handicapées psychiques », critique le rapport. Et de pointer plusieurs dysfonctionnements : la médecine du travail n’est pas suffisamment formée à la prévention de ce type de handicap, les dispositifs d’insertion professionnelle, très nombreux, forment un maillage illisible, et certaines entreprises abuseraient du statut de handicapé psychique pour entrer dans le quota des 6 %.
La prise en charge du handicap à l’école ou dans les études supérieures est enfin défaillante. La mission appelle au renforcement des programmes de prévention précoce, qui ne sont pas systématiquement appliqués, notamment pour les 0-12 ans. Elle dénonce parallèlement les coupes dans les effectifs des réseaux d’aides spécialisées aux enfants en difficulté (RASED) et des auxiliaires de vie scolaire, par ailleurs insuffisamment formés.
De façon plus générale, le rapport pointe une coopération encore médiocre et inégale des acteurs locaux et des champs sanitaire, médico-social, et social, et dénonce la faiblesse de la formation des professionnels et de l’information au public, « disséminée et difficilement accessible ». Des leviers pourtant indispensables à actionner, afin de modifier la place des handicapés psychiques dans la société.
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