Flashback. Le 27 janvier dernier, le neurochirurgien Philippe Menei et son équipe du CHU d’Angers opéraient une tumeur cérébrale chez un patient éveillé et équipé d’un casque de réalité virtuelle lambda (type oculus). Une première mondiale visant à réduire encore les troubles postopératoires et préserver au maximum les fonctions cérébrales.
Si la chirurgie éveillée, pratiquée depuis plusieurs années, permet déjà d’en tester certaines (comme le langage), « d’autres, plus complexes à solliciter en conditions opératoires, restent à explorer », souligne le praticien. C’est par exemple le cas de la cognition sociale, qui régit notre vie relationnelle, à travers la perception des expressions du visage ou des intonations de la voix. Ou encore de la cognition visuo-spatiale, une fonction primordiale pour appréhender l’espace. Au-delà d’une cartographie classique du langage, via stimulation du cerveau par électrode et interaction directe avec le chirurgien, l’opération du 27 janvier cherchait justement à éprouver le champ visuel du patient, avec un exercice de vision périphérique, basé sur des éléments lumineux, projetés en réalité virtuelle dans le casque ad hoc. « Le patient avait déjà perdu un œil », précise Philippe Menei. « Sauvegarder le second était donc une priorité. » Mission remplie au terme d’environ quatre heures d’opération, dont une sous réalité virtuelle.
Mal des transports
Innovante, cette intervention est le résultat du projet CERVO (pour chirurgie éveillée sous réalité virtuelle dans le bloc opératoire). Initié en 2014, ce programme est piloté par le service de neurochirurgie du CHU d’Angers et le laboratoire Interactions numériques santé handicap (INSH), intégré à l’ESIEA, une école d’ingénieurs en sciences et technologies digitales. Forte de ce succès, l’équipe pluridisciplinaire de recherche travaille à la conception de nouveaux tests et connexions en temps réel. Dans sa ligne de mire : l’eye-tracking, une technique empruntée au jeu vidéo, qui consiste pour le patient à diriger un objet avec le regard dans l’espace virtuel et, pour les soignants, à observer ses mouvements oculaires. Également dans les tuyaux : des examens pour évaluer la capacité à prendre des décisions.
À vocation de développement, l’ANSM a récemment validé le lancement d’un premier essai clinique. L’un de ses objectifs sera de tester la tolérance des patients à ce type de dispositif. « Cela peut créer des effets de virtual reality disease, sorte de mal des transports, généré par une discordance entre l’œil et l’oreille interne », relève le neurochirurgien. « Par exemple, si le patient est allongé dans le bloc, doit-on ou pas l’immerger dans un univers vertical ? » Autre paramètre à évaluer : « La propension de ce système à générer des états modifiés de conscience. » Une dernière perspective qui ouvre potentiellement le champ de ses applications médicales.
Légende : L’opération sous casque Oculus : une réalité « non-virtuelle » au CHU d’Angers.
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