Comment trouver un médecin traitant dans une zone en désert médical ? Cette question fait parfois figure de casse-tête pour bon nombre d’habitants de Laval, en Mayenne.
« C’est la ville-préfecture du département qui compte 70 000 habitants. Il y a des lycées, un théâtre, des cinémas… Mais aussi 4 000 à 5 000 habitants qui n’arrivent pas à trouver un médecin traitant, ce qui est quand même considérable », constate le Dr Luc Duquesnel, président de l’UNOF (la branche des généralistes au sein de la CSMF), lui-même installé dans la commune de Mayenne.
Ce département connaît depuis longtemps des problèmes de démographie médicale. « Au début des années 2000, on était dans les deux départements les moins bien lotis en France, poursuit le Dr Duquesnel. À l’époque, c’était majoritairement les zones rurales qui étaient en situation critique. Aujourd’hui, on a un peu remonté puisqu’on est à la 15e place avant la fin du classement. Dans les campagnes, il y a encore des endroits où cela reste tendu mais, ces dernières années, on a quand vu quelques médecins s’installer. En fait, le gros problème, désormais, ce sont les départs en retraite des médecins qui exercent seuls en ville. Le plus souvent, ils ne trouvent pas de successeur car les jeunes ne veulent plus travailler en étant isolés. »
À Laval, la quête d’un médecin traitant s’avère donc parfois une mission impossible pour les nouveaux habitants ou les patients des médecins qui arrêtent leur carrière. « Les généralistes, toujours en place, sont débordés et ne peuvent pas prendre de nouveaux patients. Et cela entraîne des situations très compliquées. On voit ainsi des personnes sans médecin traitant alors qu’elles sont atteintes de pathologies chroniques lourdes, par exemple une insuffisance cardiaque ou un diabète », souligne le Dr Duquesnel.
Exode inversé
La situation est telle qu’un phénomène un peu inattendu commence à se produire. « On voit maintenant des habitants de Laval qui sont obligés de faire 10 ou 20 km pour aller en zone rurale trouver un médecin traitant. Il y a quelques années, c’était souvent le contraire », souligne le Dr Duquesnel.
À plusieurs centaines de kilomètres de là, dans le département de l’Aisne, la recherche d’un médecin traitant semble être une tâche tout aussi difficile. « Il s’agit même d’un problème qui devient majeur », affirme le Dr Jean-Marie Tillie, président du conseil départemental de l’Ordre et généraliste à Crécy-sur-Serre. « À l’Ordre, nous recevons de plus en plus de courriers de gens qui nous supplient de les aider à trouver un médecin traitant. Souvent, ce sont des personnes qui viennent de déménager dans le département et qui sont parfois dans des situations médicales compliquées. En cas d’urgence, un médecin va bien sûr les recevoir. Mais au-delà, c’est souvent impossible pour lui de s’engager sur le long terme », explique le Dr Tilly.
Des pénalités adaptées
En effet, l’Ordre ne peut évidemment pas obliger un généraliste, déjà débordé, à devenir le médecin traitant de nouveaux patients. « C’est un engagement qu’on ne prend pas à la légère. Cela implique un certain nombre de devoirs que le médecin se doit d’assumer. Mais c’est difficile de faire comprendre cela à ces patients qui, et on le comprend, ont aussi besoin de se faire soigner », poursuit le Dr Tilly en constatant que leur mécontentement s’exprime parfois de manière véhémente. « C’est la même chose chez nous. On voit certaines personnes qui insultent les secrétaires ou les médecins », confirme le Dr Duquesnel, en précisant que les caisses tiennent toutefois compte de ces situations particulières et n’appliquent pas de pénalités à ces patients quand ils consultent hors parcours de soins coordonnés.
Dans un désert médical, l’accès à un spécialiste, dans un délai raisonnable, ressemble aussi souvent à un parcours du combattant. « Les délais d’attente deviennent de plus en plus longs, de deux à trois mois pour un rendez-vous chez un confrère cardiologue, ORL, gastroentérologue ou dermatologue. Et les patients, qui le peuvent, sont obligés d’aller à Reims pour être reçus plus rapidement », indique le Dr Tilly. Là encore, c’est le même constat en Mayenne. « Cette semaine, par exemple, j’ai reçu un patient qui a besoin de faire une épreuve d’effort chez un cardiologue. Eh bien, on lui a proposé un rendez-vous pour… juillet 2016 », explique le Dr Duquesnel. « Bien souvent, quand j’ai besoin d’un rendez-vous plus rapide, je suis obligé de prendre mon téléphone et d’appeler un confrère que je connais », ajoute-t-il.
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