L’adoption par les députés de la proposition de loi (PPL) de Ségolène Neuville, portant réforme de la biologie médicale, le 25 mars, n’a pas créé de consensus parmi les biologistes.
La réforme entérine pour l’essentiel la PPL du sénateur Jacky Le Menn à quelques différences près : la responsabilité du biologiste médical est réaffirmée sur le recueil des éléments cliniques et l’indication de l’examen, tandis que les paramédicaux pourront se charger du prélèvement (et non plus de la phase pré-analytique).
Le calendrier de l’accréditation des examens médicaux est refondu, avec une obligation à 50 % en 2016, 70 % en 2018 et 100 % (et non plus 90 %) en 2020, à l’exclusion des examens de biologie innovants hors nomenclature.
L’article 6, très contesté par les internes médecins et pharmaciens (il autorise à des non titulaires d’un DES de biologie médicale d’exercer les fonctions de biologiste dans leur sous spécialisation) a été réintroduit.
Hospitaliers satisfaits
Le Dr Jean-Paul Feugeas, président du syndicat national des médecins biologistes de CHU (SNMBCHU), qui combattait notamment les ristournes (effectivement supprimées) se dit satisfait et relativise ses inquiétudes. « L’accréditation est une procédure lourde administrativement, qui occupe une personne à temps plein. Les réunions se multiplient, cela demande de l’argent et du temps, mais je pense que cela va se faire à un rythme raisonnable », estime-t-il.
Partisan de l’article 6, il salue sa réintroduction et, lui-même titulaire du DES de biologie, réfute toute intention de dénigrer cette formation. « Cet article est le résultat d’un compromis. Je tiens à ce que le DES de biologie soit valorisé. En tant qu’hospitalier, nous avons besoin de cette formation polyvalente pour les urgences et les gardes. Mais les internes qui s’inscrivent en master 2 en prévision d’une carrière hospitalière ne sont pas si nombreux » explique-t-il. « Je comprends les inquiétudes des jeunes. Mais cet article les protège, car ils ne savent pas toujours quel DES choisir » poursuit-il.
Libéraux préoccupés par la financiarisation
« Déception » est le mot qui s’impose à François Blanchecotte, président du Syndicat des biologistes (SDB), pour parler de la réforme de la biologie. « Le débat national n’était pas à la hauteur. Nous avons passé un temps fou pour expliquer aux parlementaires les effets collatéraux du texte. En vain. Il y a un vrai biais entre les objectifs affichés auxquels nous souscrivons et les moyens adoptés », estime-t-il.
François Blanchecotte déplore le calendrier trop rapide de l’accréditation et les dérogations accordées à l’établissement français du sang. Selon lui les mesures destinées à lutter contre la financiarisation du secteur ne sont pas suffisantes et ne permettent pas la survie d’une biologie de proximité.
Le SDB ne désarme pas. Les biologistes sont appelés à nouveau à arrêter la télétransmission des feuilles de soins et à fermer leurs cabinets l’après-midi pour donner un aperçu du futur maillage territorial. Une grève totale est prévue le 17 avril, date de l’entrée en application des baisses de tarifs (voir ci-contre).
Jeunes en grève
Pour les internes, la grève des gardes et des astreintes commence dès le 2 avril, à l’appel de la Fédération nationale des syndicats d’internes en pharmacie (FNSIP) et du Syndicat des jeunes biologistes médicaux (SJBM). « Les jeunes ne pourront plus créer de laboratoires : cela coûte trop cher, et l’accréditation par tranches que nous demandions pour une nouvelle structure n’a pas été retenue » avance Thomas Nenninger, président du SJBM.
Le ton est acerbe sur le retour de l’article 6, qui introduit, selon le Dr Nenninger, une rupture d’égalité dans l’enseignement comme dans la prise en charge des patients. « Nous n’acceptons pas cette spécifité qui reviendrait à la biologie. C’est comme si un ingénieur très pointu avait tout d’un coup le pilotage intégral de l’avion. Nous souhaiterions en revanche un débat de fond sur la transversalité dans les études et le passage raisonné d’une spécialité à une autre, avec des validations d’acquis de l’expérience », expose Thomas Nenninger.
Prochaine - et dernière - étape : le 10 avril, 10 heures, en commission mixte paritaire.
Hasard du calendrier, le journal officiel du 27 mars a entériné la décision datée de février de l’Union nationale des caisses d’assurance-maladie (UNOCAM) de baisser les tarifs de 33 actes de biologie médicale. Cette modification de la nomenclature entrera en vigueur le 17 avril. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2013 prévoit 155 millions d’économie sur l’imagerie médicale et la biologie.
Après deux burn-out, une chirurgienne décide de retourner la situation
La méthode de la Mutualité pour stopper 2,4 milliards d’euros de fraude sociale
Yannick Neuder lance un plan de lutte contre la désinformation en santé
À la mémoire de notre consœur et amie